Raoul Walsh signe un film respectant les unités du drame classique : unité de temps (quelques jours), de lieu (la Vallée de la mort), d’action (une chasse à l’homme). L'issue ne saurait être que tragique. Le scénario associe le film de gangsters au western. Wes McQueen (Joel McCrea) est un hors-la-loi à la gâchette facile et précise qui, vieillissant, songe à se retirer. McCrea joue un cowboy convaincant, il dégaine et galope avec aisance, il lui manque néanmoins ce brin de fantaisie, cette ombre de sourire qui font le charisme d’Humphrey Bogart ou de Robert Mitchum.
La scène d’introduction est jubilatoire. Une inoubliable et adorable grande tante (Hallene Hill) convainc un shérif méfiant de transmettre à son cher neveu Wes un petit panier. Il s’échappe et fuit vers le Colorado. Hélas, le dénuement le contraint à accepter un dernier coup. Combien de truands ne sont-ils pas tombés pour ce fameux ultime hold-up ? Ici, 100.000 dollars livrés dans un train. Walsh se garde de nous proposer une œuvre lumineuse : John Wayne ne s’avancera pas sur son blanc cheval pour tirer la jeune orpheline des griffes des méchants. La fiancée de Wes est morte et enterrée. Il sauve provisoirement la sage Julie Ann (Dorothy Malone) et son père, mais que faire sans argent ? Rien, ou si peu. Les trois voyous le trahissent et le cheminot le vend au shérif. Wes s’enfuit avec le trésor. Les Etats-Unis sont un pays de liberté et de justice, la loi y proscrit le crime en mettant à prix la tête du déviant. Wes voit la sienne portée à 20.000 dollars, mort ou vif. Une somme faramineuse qui, de fait, le condamne. A qui désormais prêter confiance ? La belle et douce Julie Ann tente de le livrer. Si son père lui reste fidèle, n’a-t-il pas tenté, la veille, de la vendre à Wes ? N’a-t-il pas accepté trop précipitamment son argent ? La misère corrompt tout…
Le shérif, qui attendait que la récompense augmente, réunit une vingtaine d’adjoints et de pisteurs indiens et s’élance à sa poursuite. Il ne s’embarrasse d’aucun scrupule pour lui tendre un piège, plaçant un tireur embusqué. Tous pourris ?
Presque. Walsh nous accorde deux âmes pures : le frère franciscain, qui accorde sa bénédiction aux fuyards et héritera du magot, et la très belle Colorado (Virginia Mayo) aux yeux si clairs. Elle avoue être née sous un chariot des amours interdites d’un vacher et d’une indienne. Après une enfance difficile et une jeunesse tumultueuse, la danseuse de saloon a pris la fuite, seule et sans un sou. De même que Julie Ann ne convolera pas avec le fils du magnat de la côte ouest, la fille de bar n’ose approcher le caïd éprouvé. Wes est riche, mais blessé. Il sourit à Colorado et lui propose de l’épouser. Ils bénéficieront de quelques minutes de pur bonheur. Les justiciers cavalent, la curée approche.