Nouvelle œuvre des plus excentriques pour Guillermo Del Toro, féru de créatures en tous genres. Récompensé par les meilleures distinctions possibles pour La Forme De L'Eau, il offre un somptueux hommage aux années 60, sa culture, son contexte politique, ses codes cinématographiques et son atmosphère désuète propre aux uchronies. C'est ainsi que le metteur en scène habille son histoire romantique plutôt singulière, entre cette femme de ménage muette (Sally Hawkins) et cette créature humanoïde amphibienne (Doug Jones) façon L'Étrange Créature du Lac Noir adaptée dans le plus pur style visuel de Del Toro.
Dans des décors emplis d'un charme passé, le réalisateur nous invite donc à un conte poétique, ou la naïveté amoureuse se confronte à la dureté des mœurs sociaux. C'est un réel mélange des genres qui se déroule, dans de superbes décors et une ambiance musicale magique joliment composée par Alexandre Desplat. Les acteurs principaux y sont attachants, et l'antagoniste joué par Michael Shannon expose des traits bien caricaturaux qui se fondent à merveille dans le film. Car il y est également question de comédie dans cette fable, et bien souvent les réactions des personnages et leurs discussions nous amadouent tout autant qu'elles nous font sourire.
Cela n'empêche pourtant pas de ressentir une précipitation exagérée de cette romance principale, bien trop rapide et facile dans son développement. Certes, quelques moments de tension et d'incertitude parsèment le film, sans toutefois impacter réellement le déroulement de l'intrigue. On note également un montage parfois expéditif, et surtout une mise en lumière d'éléments secondaires sur la première heure dont on questionne encore l'indispensabilité sur l'ensemble du long-métrage. Pas de quoi émacier la beauté, à la fois plastique et émotionnelle, qui émane de La Forme De L'Eau, mais suffisant pour peiner à le considérer comme le chef d’œuvre de Del Toro.