Sorrentino arrive à embrasser la vie en un seul film.
J'avais haï This Must Be The Place.
Mais vraiment.
Mais tout ce qui était raté dans ce film est réussi dans celui là.
J'en suis sortie bouleversée.
Sorrentino arrive à embrasser la vie en un seul film.
Ses contradictions. Sa beauté. Sa vacuité. Ses choix. Son absurdité.
Et surtout notre quête à tous d'essayer parfois d'y trouver du sens.
Ces moments où la réalité nous frappe de plein fouet,
où on entrevoit toute la laideur de l'âme humaine,
même chez des gens qu'on croyait aimer.
Les relations superficielles qu'on entretient par habitude.
Celles qui nous surprennent.
Les rencontres qui bouleversent.
L'espoir. Les regrets aussi.
Et ces instants, où on se réfugie dans ce que l'on a de plus précieux.
Notre mémoire, nos souvenirs.
Ces instants où on réalise qu'on a touché du doigt le bonheur absolu, sans le savoir.
Des secondes de grâce qu'on cherche à reproduire sans y parvenir.
Les plaisirs simples. Marcher. Penser. Observer.
Se laisser surprendre par la beauté.
Parce que c'est elle qui est au centre du film.
La beauté à l'état pur.
Le marbre d'une statue qui émeut et scintille dans la nuit.
La silhouette d'une femme qui oscille en talons haut, dans une rue déserte.
Le ciel qui s'embrase d'orangé au dessus du Colisée.
Rome n'a jamais été aussi belle.
Transfigurée par la caméra, en de longs mouvements souples et félins, elle apparait comme un écrin précieux et poétique, et indispensable à l'histoire.
Celle de Jep, interprété par Toni Servillo, aujourd'hui un des plus grands acteurs au monde.
Tout en subtilité, fêlures et hargne parfois.
La hargne d'être perdu dans une vie futile et creuse, y cherchant désespérément un sens.
Ses questionnements et hésitations se calquent sur les notre.
Ceux qu'on a tous eu, à un moment donné de nos vies.
Il est impossible de ne pas être touché par ce film, tant il tend à l'Universel,
de ce que l'humain a de plus beau, et de plus noir, enfoui au fond de son âme.
Cette nuit, je sais que je marcherais sur les pas de Jep,
je rêverais de ballade en solitaire au petit matin,
dans Rome pas encore éveillée, le bruit de mes pas,
les oiseaux qui commence à piailler, les rues vides, le silence dans la ville...
La beauté simple des moments de grâce où l'on ressent de manière fugace,
le bonheur de se sentir vivant...