In a galaxy far far away...
Comme tout sale gosse étant né après 1980, j'ai découvert "La guerre des étoiles" sur la vieille télé noir et blanc du salon et j'ai tout de suite été émerveillé par le monde qui s'offrait à moi. Comme tout ado péteux qui se respecte, je proclamais devant les filles du bahut que "Le voleur de bicyclette" était mon film préféré alors qu'en fait il s'agissait de "L'empire contre-attaque". Comme tout pré-trentenaire réac, je me suis voilé la face à la sortie de "La menace fantôme" en me disant que "mais non, c'est pas si nul, tout prendra sens à la sortie de l'épisode 3" pour ensuite pointer du doigt d'un air dédaigneux les petits pisseux qui osaient dire du bien de la prélogie. Comme tout fan, j'ai été tenté plus d'une fois d'envoyer de l'entraxe à George Lucas pour ce qu'il a fait subir à sa trilogie initiale. Comme tout futur papa geek, je ne prêterais jamais mes figurines ultra giga méga collector Star Wars à mes enfants. Comme tout grand gamin qui n'a jamais vraiment grandit et qui n'a pas prévu de le faire, j'aime toujours autant "Star Wars".
A l'image de son pote Brian De Palma, le barbu / binoclard George Lucas aura créé de toute pièce tout un univers en recyclant ce qui le bottait le plus, à savoir le récit chevaleresque, la science-fiction, le western, Kurosawa ou encore Tolkien. A partir d'éléments piochés par-ci par-là, Lucas aura donné naissance à toute une mythologie, à un micro-univers passionnant et fascinant où se croisent un fermier se rêvant pilote, une princesse coiffée avec des pains aux raisins, un baroudeur de l'espace super cool, son copilote à la pilosité surabondante, un robot doré et son compagnon bipeur, un vieux chevalier en exil, un méchant super flippant sapé comme un samouraï futuriste, des épées lumineuses, des pistolets lasers, des monstres en tout genre, des vaisseaux spatiaux et surtout beaucoup de bruit.
Premier volet d'une trilogie qui deviendra mythique, "La guerre des étoiles" se pose d'emblée comme le quatrième épisode d'un immense récit qui ne prendra forme que bien plus tard, un western galactique revenant aux fondements mêmes des contes et légendes, parcours initiatique totalement dénué du moindre cynisme, prônant la naïveté comme philosophie de vie, vendant avant toute chose du rêve à son audience, quelque soit son âge. Lucas veut simplement faire partager ce qu'il aime et répandre un peu de magie à une époque où le cinéma cherchait surtout à régler ses comptes avec le pouvoir en place.
Incroyable coup de poker dont personne ne voulait et qui propulsa son créateur sur orbite, "La guerre des étoiles", en plus d'être un pur moment d'évasion ayant incroyablement bien résisté aux ravages du temps, est surtout une révolution dans le septième art, la preuve vivante que l'on peut donner naissance à nos rêves les plus fous même avec un budget modeste. Grâce à un montage dynamique et à des effets visuels révolutionnaires, "La guerre des étoiles" allait transformer le paysage bien trop figé du space opera, poussant à son paroxysme ce qui avait déjà été fait sur "2001" pour offrir au public du jamais vu sur grand écran, des batailles interstellaires palpitantes et grisantes, véritable tour de montagnes russes qui laissa plus d'un spectateur de l'époque sur le cul, le tout orchestré par le score inoubliable de John Williams et interprété par un casting impeccable, dont on retiendra surtout le charisme incroyable de Harrison Ford et la voix inoubliable de James Earl Jones.
On pourra peut-être reprocher à George Lucas d'avoir contribué (volontairement ou pas) à la renaissance d'un cinéma basé principalement sur l'esbroufe. On pourra lui reprocher d'être passé du côté obscur et d'être devenu un simple marchand de jouet, vendant son âme au dieu Dollar. On pourra également lui reprocher d'avoir inlassablement mutilé sa propre création, afin de la faire correspondre davantage à sa prélogie aussi digeste qu'un tube de Jennifer. Mais on ne pourra jamais reprocher à George Lucas d'avoir offert à des milliards d'enfants le plus beau des cadeaux: du rêve à l'état pur.