Avant d’obtenir ses gallons dans l’univers horrifique, Lucio Fulci œuvrait depuis nombre d’années pour la renommée du cinéma italien. Du western à la comédie en passant par le film d’aventure, le futur maitre de l'horreur s’est frotté à divers genres cinématographiques sans réussir à rencontrer le succès escompté.
Il faudra attendre la sortie de L’enfer des zombies en 1979, vingt années après ses débuts derrière la caméra, pour qu’il se fasse connaître auprès de la scène internationale.
À défaut de jouir d’une liberté financière lui permettant de réaliser des projets qui lui sont cher, l’homme se voit donc contraint d’accepter une commande pour un genre en perte de vitesse : le poliziotteschi. Puisant ses racines dans des œuvres américaines telles que L’inspecteur Harry, The french connection ou Serpico, le néo-polar italien se caractérise par sa description d’une société où la police est corrompue et où les milieux mafieux ont pris le pouvoir.
C’est donc lors du chant du cygne de ce genre que Lucio Fulci est sollicité pour nous narrer les péripéties d’un contrebandier devant faire face à l’arrivée d’un trafiquant de drogues. En partant de cette trame convenue, le réalisateur réussit à créer une histoire rythmée alternant courses-poursuites, règlements de comptes sanglants tout en prenant soin de construire un récit solide.
Assez académique dans sa réalisation, La guerre des gangs tire son épingle du jeu en créant une galerie de personnages consistant et dont leurs relations forment un aspect central de l’intrigue. On se laisse rapidement embarquer dans cet affrontement où deux milieux aux mœurs divergentes vont se déchirer.
D’un côté, la contrebande est présentée comme une organisation certes illégale mais permettant de faire vivre de nombreuses familles et ainsi les éloigner de la misère. Une entreprise louable où Luca est l’incarnation même de ce mal nécessaire inoffensif.
De l’autre côté, le marché de la drogue est présentée comme une filiale s’imposant dans la violence et ne semant que la mort autour d’elle. Elle est la source des problèmes occasionnés aux contrebandiers.
La rencontre entre ces deux univers ne pourra que causer des dommages collatéraux.
Tout au long de la bobine, l'auteur sème des éléments permettant de mettre en évidence l’opposition entre ces deux activités. On peut reprocher au réalisateur de faire des contrebandiers des hommes trop bons sous tout rapport, cela n’entache en rien le plaisir que l’on a à suivre Luca dans ses tourments.
Un autre aspect marquant réside dans la retranscription de la violence de ces milieux. Durant le tournage, Lucio Fulci souhaitait se concentrer sur ce point et cela est flagrant. Les meurtres sont particulièrement violents et sanglants. Certes cette approche est une caractéristique propre au genre cinématographique abordé mais on a l'impression dans le cas présent que le réalisateur se permet toutes les transgressions. Certaines scènes pourraient se retrouver dans des œuvres horrifiques et plus particulièrement des Slasher tant l’hémoglobine coule à foison. Entre fusillades sanglantes, visage déchiqueté à la mitrailleuse et torture au chalumeau, l’œuvre n’est clairement pas conseillé aux âmes sensibles.
En somme, sans pour autant être une œuvre majeure, La guerre des gangs est un petit bijou violent remplissant ses objectifs tout en offrant un bon moment de cinéma. Une œuvre méconnue de l'auteur italien annonçant sur quelques aspects ses futurs méfaits dans le genre horrifique.