Comme il l'a toujours fait dans ces long-métrages, Polanski diffuse dans son film au gré d'interventions - psychologiques ou physiques - violentes des situations biaisées, troubles et ambiguës, faisant s'effondrer au passage, en plus de nos repères, quelques valeurs bien convenables. Cette fois-ci, le contexte politique appelle donc de nouvelles notions que le réalisateur parvient tout aussi bien à foutre en l'air avec brio.

Peu importe que la diégèse situe le film en Amérique latine, le décor n'en a pas significativement les caractéristiques - effectivement, il fut tourné à Boulogne-Billancourt. Peu importe que Ben Kingsley soit célèbre pour avoir interpréter Gandhi ou l'attaché comptable d'obédience juive du Juste Oskar Schindler dans le film éponyme de Steven Spielberg, Polanski lui confère le rôle du supposé méchant. Inversement, il donne le rôle du mari avocat à la tête d'une commission d'enquête sur les exactions d'un régime totalitaire à Stuart Wilson, remarqué principalement dans le rôle du méchant de "Le Temps de l'Innocence" de Martin Scorsese. Quant à Sigourney Weaver, on ne sait plus trop où donné de la tête lorsque débarque Ellen Ripley dans un huis-clos psychologique.
Car il s'agit effectivement d'un huis-clos, genre cher au cinéaste qui permet de confronter les unes aux autres ces entités en entraînant une dialectique, non-conclusive bien évidemment, qui fait toute la force du film: le bourreau et la victime, le bien et le mal, le vrai et faux, le légal et le légitime.

Tiré d'une pièce de l'auteur Ariel Dorfman, le film trouve dans ses dialogues une justesse toute particulière. Les disputes entre les deux époux, les confessions éprouvantes de longueur et de détails du personnage de Paulina Escobar, les argumentations pourtant tangibles de l'accusé ou de l'avocat fantoche qui néanmoins volent subitement en morceaux à la fin; chaque retournements de situation implique logiquement un renversement de valeur et une situation de crise violente sans pour autant que l'intrigue ne tombe dans une mécanique répétitive et lassante.
Celle qui fut la victime des pires atrocités autant physique que verbale, sous prétexte qu'elle "est sûre" d'avoir retrouvé son bourreau, s'autorise un interrogatoire à la justice et aux méthodes douteuses. Le victime devient coupable, entraînant avec son innocent mari. Et quand l'homme qui est le fruit d'un possible malentendu fait aveux qui ne sont ni faux, ni vrai, rien n'est plus confus. Les permutations de points de vue et de statuts se succèdent en ne en ne dévoilant aucune solution au jugement sommaire mis en place ou au contraire, ouvrant de plus en plus nos esprits à d'autres interrogations - qui est fou ? où est la vérité ?

Polanski clôt ainsi son film non pas en baissant lâchement les bras face aux fatras de complexité qu'il nous déploie. Au contraire, il semble le prôner, presque avec provocation, ou alors cynisme, lors de la dernière scène, laissant à chacun son opinion, sa vérité - sa folie ?...
JulienGris
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le 9 nov. 2011

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JulienGris

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