Chez les gangsters de Suzuki, le règle est simple : pas de milieu dans le Milieu. Soit c'est énorme, ça hurle, ça explose, ça grimace, soit c'est minuscule et ça se cache dans les coins. Et un peu comme dans un poème de Baudelaire, les personnages semblent errer dans des des forêts de symboles qui les observent avec des regards familiers.

Encore une fois, le scénario est confus et n'a finalement pas beaucoup d'intérêt : très vite on abandonne l'espoir de comprendre qui est qui, qui doit faire quoi. Le héros aux joues de hamster est comme une balle de ping pong entre deux gangs ennemis, cherchant une vengeance qui détruira tout sur son passage, sans rien lui apporter au final. Comme si la seule joie de Suzuki était d'empiler les choses (ou les sons) pour mieux les voir disparaître.

Ainsi le film se transforme petit à petit en jeu de piste absurde, et l'on se prend à traquer les détails qui nous font des clins d'oeil en arrière plan, à l'image de cet oeil de la Joconde encadré dans le bureau d'un des chefs de Clan. Numéros de téléphones, maquettes d'avions envahissantes, billes de Pachinko, fleurs rouges, écrans de cinéma, statuettes kitsch, tableau de St Sébastien démantibulé, comme si les objets muets avaient à l'arrivée plus à nous dire que tous ces êtres humains qui ne font que gesticuler dans cette histoire dite par un idiot, pleine de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien.
Chaiev
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le 17 juin 2011

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Chaiev

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