Bref… Cette dernière journée commence avec l’attendu bollywoodien (Hollywoodien plus exactement) Baahubali – The Beginning (le film est en deux parties), de S.S. Rajamouli. Pour ceux qui ne sont pas familiers avec le cinéma de Bollywood, ce sont ses films très longs, 3 heures en moyenne, avec des chansons et des chorégraphies souvent grandioses. Les indiens vont voir ces films en famille, durant quasiment une journée entière, avec des spectacles et autres activités. Tout le monde connaît déjà les chansons, l’album de la BO sortant toujours avant (pour donner aux gens le temps d’apprendre les paroles), et la salle de cinéma se transforme en une grande fête qui ferait rager tout bon spectateur français qui ne supporte pas même le grincement du siège de son voisin qui essaye de changer de position dans le calme le plus complet. Baahubali, c’est le plus gros budget indien, et ça se voit à l’écran. Techniquement, le film se tient du début à la fin. La mise en scène est rythmée et n’hésite pas à amener la caméra dans des endroits complètement improbables, la photographie est soignée et les effets spéciaux sont convaincants, surtout dans cette séquence de batailles plus qu’épique. Malgré un scénario assez faible, l’univers déployé est assez beau, surtout ce petit village au pied de ces immenses cascades. L’histoire, c’est deux frères ennemis qui se battent pour accéder au trône, l’un est gentil, l’autre est méchant. Malheureusement, le film a été amputé de toutes ses chorégraphies car nous le voyons dans un montage international. Il est en effet plus simple d’exploiter le film à l’étranger sans l’heure obligé de chorégraphie chanté. Pourtant, c’est ce qui fait un des intérêts premier de ce cinéma si particulier.
Je ne compte pas partir sur une analyse de fond sur le cinéma de blockbuster indien car je ne m’y connais que trop peu, mais à la vue de ce film, je n’ai pu qu’être écœuré par le discours foncièrement machiste, guerrier et fasciste (pas plus qu’un certain cinéma hollywoodien évidement). Le film commençait plutôt bien, avec le personnage de cette guerrière, qui se bat mieux que ses compagnons d’armes, jusqu’à ce que notre héros musclé arrive et lui dise (sans caricature) “Je suis un homme, tu es une femme”, tout en la déshabillant et en la maquillant… Comment ne pas être écœuré par cette séquence ? Ce personnage deviendra alors plus faible que nouveau né, et se jettera avec une facilité déconcertante dans les bras de son sauveur (alors que jusqu’ici, elle mettait des tartes dans la gueule aux plus membrés). La violence complaisante des scènes de guerres est également profondément déplaisante, érigeant ainsi en héros/icône celui qui massacrera le plus d’humain. Des scènes comme celles du drap enflammés sont ainsi terriblement malsaine, et le sourire au coin de notre héros en voyant brûlé tous ces méchants (qui plus est plus noir que les gentils), je ne peux m’empêcher de le voir comme un tortionnaire répugnant se délectant de la souffrance d’autrui. Mes camarades me disent que je vais un peu loin dans l’analyse politique, et que je devrais simplement profiter du divertissement, mais à la même manière qu’un Transformers, Sex & the City 2 et autres blockbusters hollywoodien (soi-disant apolitique mais profondément gerbant dans l’apologie d’un système d’hyper-consommation capitaliste), Baahubali peut se voir comme le reflet d’une société indienne malade, dans laquelle le viol et la misogynie, les systèmes de castes et le racisme sont encore très présents. Le deuxième volet sort l’année prochaine, et je reviendrais sur l’ensemble du film à cette occasion. En attendant, je vous conseille le long-métrage NH10 de Navdeep Singh (je l’ai chroniqué à l’occasion de l’Étrange Festival), à l’opposé du cinéma Bollywood.
Tiré du journal du festival de Sitges 2015 : lire l'article entier sur mon blog...