Le premier film de la Katsu Productions, fondée cette même année en pleine crise du cinéma de studio. Katsu qui a amassé une somme rondelette avec les films précédents décide de se lancer dans la production de films de chanbara et livre ici un magnifique opus (co-produit par Masaichi Nagata, légendaire producteur de la Daiei). Probablement l’épisode le plus sérieux de la série, pour ne pas dire le plus sombre, et aussi l’un des plus politisés, ce qui n’est pas surprenant dans la mesure où Katsu en a confié la réalisation à Satsuo Yamamoto (Quartier sans soleil, La Tour d’ivoire) grand réalisateur connu pour son appartenance au Parti communiste japonais. Cette rupture avec les réalisateurs de films de samouraïs habitués de la série va marquer le ton du film, plus ancré dans la réalité que les autres épisodes. Parmi les autres noms à connaître, le directeur de la photographie sur Ugetsu, entre autres, qui donne une superbe photographie au film et de nombreux clair-obscurs.
Zatoichi arrive dans un village qu’un samouraï errant a repris sous sa main et éduque aux techniques de productivité agricole et organise en collectivité. Le personnage de Shushi Ohara, un ancien samouraï de cour à Kyôto et « père » du collectivisme japonais a réellement existé. Il fera la leçon à Zatoichi en lui expliquant que la voie du sabre ne mène nulle part et qu’aucune cause ne justifie le sang qui souille la terre. Zatoichi poursuit sa route et atterrit chez un boss, qui endette les paysans du village dans sa salle de jeux. Le boss qui connaît la réputation de Zatoichi l’utilise pour se débarrasser d’un boss rival, Asagoro (joué par Rentarô Mikuni un nom connu des studios) mais Zatoichi voit en lui un yakuza de la vieille école et se retourne contre le premier boss, qu’il tue presque de sang-froid. Il quitte ensuite le village pour vivre parmi une compagnie d’aveugles, qui le traitent très mal. Il apprend alors qu’Asagoro se comporte en despote dans le village où il est désormais seul maître et, insulte suprême, a reçu le crochet de connétable de la part des autorités. Pendant qu’il revient au village, il découvre un paysan pendu dans sa ferme qu’il a perdu à cause de ses dettes au jeu. Une autre paysanne, vendue comme prostituée, se suicide dans la mer. Asagoro qui voit en Ohara un agitateur le fait capturer et livrer aux autorités qui l’accusent de complot séditieux. Zatoichi le fait libérer après avoir commis un beau massacre et reçu plusieurs blessures, et conclut en disant à Ohara : « Votre vie valait bien le sang que j’ai fait couler sur cette terre », avant de s’éloigner du village, dans une magnifique lutte entre la nuit et le soleil.
Un épisode à part, mais quel film !