Colossale incantation contre la guerre, "La Ligne Rouge" marque le retour de l'immense et rare Terrence Malick de bien belle façon : saisissant le spectateur par la main pour l'entraîner avec douceur le long de chemins peu fréquentés, ce film à la fois rousseauiste (la contemplation de la Nature et une infinie confiance en la nature humaine la plus primitive) et pourtant désespéré (nulle autre solution que la Mort...), confine trois heures durant à la litanie hypnotique ! En nous parlant de la vanité humaine et du sacrifice, en interrogeant la place de l'homme dans l'univers, et lovant ce discours dans l'intimité des plus hautes valeurs de la vie, Malik livre un "film de guerre" déroutant, non exempt de longueurs et répétitions, mais qui constitue une expérience peu commune dans le cinéma hollywoodien... "La Ligne Rouge" n'est finalement pas réductible à une formule facilement explicable : tout le contraire d'une œuvre somme qui viserait à une perfection bien bouclée et étalerait sa maîtrise, le film impressionne par les risques qu'il prend, par sa prolifération et ses contractions, par son caractère finalement incommode... mais au milieu de toutes ces "expériences", surgissent de grands moments, plus stimulants que dans la majorité des "chefs d’œuvre" habituels. [Critique écrite en 1999 et 2004]