Qu'y a t il de plus pontifiant et bête qu'un soldat pontifiant et bête ? Une compagnie de soldats pontifiants et bêtes. Face à l'absurdité de la guerre, on peut réagir avec l'humour désespéré d'un Saki, mais on peut aussi, comme Terrence Malick, sombrer dans la lourdeur "philosophique". Malheureusement, tous les soldats de la Ligne Rouge semblent sans exception avoir choisi la deuxième option. Et là où Coppola avait su utiliser avec fulgurance la guerre du Vietnam pour éclairer d'une lumière crépusculaire l'un des textes les plus absolus de toute la littérature, Malick ne fait qu'exploiter la répugnance plus ou moins abstraite que tout un chacun ressent envers la guerre pour nous placer ses confondantes interrogations de bouddhiste débutant.
Film soi-disant contemplatif ? En ce qui me concerne, impossible de contempler quoi que ce soit dans cette cacophonie surajoutée : méditations intérieures dignes de figurer sur une boite de Kellog's Corn Flakes, dialogues qu'on dirait calqués sur une conversation "sérieuse" entre animateurs de Fun Radio, glorification d'enfonçages de portes ouvertes à la Forrest Gump qui émaillent tout le film... Le tout soutenu par l'insupportable musique d'un compositeur qui, contrairement à ce qu'il a l'air de croire, est à Wagner ce que le Rondo Veneziano est à Vivaldi.
Seul répit : la prise de la colline, qui dure environ une heure. Enfin, luttant pour leur survie, les soldats arrêtent d'aligner les banalités vaguement new-age pour enfin se coltiner à toute l'horreur de la bestialité qui se déchaîne autour d'eux et en eux. Un (trop) court moment d'émotion cinématographique pendant lequel on se dit que le réalisateur aurait dû méditer ce vieux proverbe chinois "si ce que tu as à dire n'est pas plus beau que le silence, tais-toi".
Eh, Malick, si ce que tu as à dire n'est pas plus profond que le Mal, ta gueule !