Après seulement quelques minutes, La Loi de Téhéran se mesure déjà à French Connection, le temps d'une poursuite sèche et nerveuse dans les rues iraniennes semblables à un labyrinthe. Nous voilà donc déjà vissés au plus près des personnages. Littéralement traînés sur le bitume.
La traque menée par ce flic hargneux est brutale, sans aucune concession. Prenant plus d'une fois des allures de documentaire choc. Entretenant aussi un sens du suspens haletant, le temps d'une descente chez un dealer qui se terminera de manière inattendue.
La traque menée pour remonter le réseau est violente, obsessionnelle, tord les vies jusqu'à les briser pour obtenir des aveux, un tuyau, une piste. La loi de Téhéran aurait pu se contenter de cette traque chauffée à blanc par son Dirty Harry local qu'il aurait déjà été une intense réussite. Mais il prend le virage de l'affrontement entre un flic et sa proie. En forme de guerre des nerfs. En reprenant une approche miroir, tellement les enjeux entre les deux hommes sont finalement similaires. Tant la carrière de l'un et la vie de l'autre ne tiennent plus qu'au même fil.
Ces deux-là sont pris au piège d'une situation intenable, tout comme la population iranienne presque toute entière, prise en étau entre l'absence de morale policière, la misère la plus inhumaine et la maladie de l'addiction.
Que ce soit écrasée par le soleil, subissant une descente musclée dans un camp improvisé, ou encore dans une prison plus que vétuste aux allures de cour des miracle, c'est finalement tout un pays qui devient le personnage principal du film, subissant la tension sans jamais pouvoir y répondre. Subissant la pauvreté sans jamais avoir la perspective de s'en sortir. Subissant l'inhumanité d'un régime de violences.
C'est là que que la caméra de Saeed Roustaee trouve son apogée. En offrant des mouvements amples. en signant des plans tantôt de toute beauté, tantôt glaçants. En filmant l'étouffement d'un pays dont elle prend le pouls : celui de l'urgence dans une première partie renversante. Avant de se poser pour montrer une chute au ralenti dans un face-à-face tendu et rugueux, où une poésie insoupçonnée peut faire irruption avant le drame familial.
Le tout aboutissant à un dernier plan qui impressionne, mais véritablement désabusé, rempli de zombies s'agitant vainement sur une autoroute paralysée par une énième intervention policière dispersant une fourmilière. Achevant de dessiner une triste fresque saisissante en mode coup de poing.
Telle est la loi de Téhéran.
Behind_the_Mask, crack boum hue.