Pas grand fan d’un cinéma de SF dont l’objectif premier est de montrer un monde inconnu et qui est donc, par définition, souvent très contemplatif, je parviens cependant à accrocher à certains films des années 50 et 60. Cette Machine à explorer le temps, qui fait évidemment partie des grands classiques du genre, est un film intéressant. Il bénéficie de beaux décors (principalement en studio), d’une interprétation sans faille (dommage que Rod Taylor n’ait été que l’acteur de deux films) et d’un récit ancré dans son époque. La plus-value de ce film est assurément, à mon sens, le choix d’avoir articulé l’histoire autour du péril nucléaire. Au-delà de ses couleurs chatoyantes et de son ton faussement naïf, le film est ainsi clairement très sombre. A ce titre, les étapes du voyage imaginées par le scénariste David Duncan (elles ne sont pas présentes dans le livre) sont tout à fait pertinentes.
Si la dimension philosophique ne va pas au-delà de « l’homme est un loup pour l’homme », on apprécie l’originalité avec laquelle le propos est amené, ce qui lui donne une résonance particulière. L’ensemble, en revanche, n’est pas toujours palpitant. Contrairement, par exemple, à La Planète des singes qui bâtit un récit riche en péripéties à partir de son postulat, La Machine à explorer le temps est bien moins divertissant. La tension y est mince et le mystère moins profond. Le choix d’un récit en flashback, évidemment accompagné d’une voix off, retire, de fait, de nombreux effets, ce qui est évidemment regrettable.
Poétique à bien des égards, notamment grâce à ses effets spéciaux (même si certaines maquettes sont très voyantes et si quelques trouvailles sont désormais vieillottes), il faut porter au crédit de l’ensemble sa capacité à avoir donné vie avec goût à un univers où tout était à imaginer (la machine, les Morlocks). A ce titre, ce film est à l’origine de très nombreux œuvres du genre. A noter, ayant vu il y a peu le remake de 2002, que ce dernier n’est pas aussi mauvais qu’on le dit. Les partis-pris narratifs ont, eux aussi, une véritable cohérence et la représentation visuelle du monde des Morlocks est pertinente. Si certains choix sont très maladroits, il apporte une variation à cette version de George Pal qui, elle aussi, apportait son lot de variations à l’œuvre originale de Wells.