En 1988, la ségrégation, le racisme et l’extrémisme religieux via le Klu Klux Klan auront fait l’objet de deux adaptations cinématographiques marquantes. La première, et certainement la plus connue s’intitule : “Mississippi Burning” d’Alan Parker. Le réalisateur britannique se servira d’un fait divers sordide - la disparition de trois militants des droits civiques dans le Mississippi en 1964 - pour tacler l’Amérique suprémaciste des années 60. Le résultat implacable fera de “Mississippi Burning” un drame historique et un thriller sans concession. Pour l’heure, le film qui nous intéresse ici est tout aussi efficace, même si son approche est différente. En effet, avec “La main droite du diable”, Costa Gavras ancre son récit au cœur du Midwest américain dans les années 80. Après l’assassinat d’un animateur vedette d’une radio libre de Chicago - en cause, ses propos libertaires, inadmissibles pour certaines mouvances extrémistes - le F.B.I. charge l’agent Cathy Weaver (Debra Winger) - ancienne étudiante en littérature et jeune recrue - d’infiltrer la communauté. Arrivée sur les lieux en temps que saisonnière pour les moissons, Cathy va devoir s’approcher d’un fermier veuf du nom de Gary Simmons (Tom Berenger). Des soupçons à son encontre pourraient faire de lui un suspect. Pourtant, l’homme que nous avons devant les yeux, est tout ce qu’il y a de plus recommandable - une sorte de gendre idéal, choyé par sa maman et entouré de ses amis - celui-ci fera succomber notre jeune infiltrée. Contrairement à Alan Parker qui d’emblée, nous propulsait dans la violence la plus frontale - années 60 obligent - Costa Gavras, lui, nous ouvre la porte d’une communauté champêtre aux valeurs morales indiscutables. Le travail, la famille et l’église sont le leitmotiv de ces gens simples. Ce verni sociétal presque idyllique que nous assène habilement le réalisateur de “Z” ou encore de “Music Box”, va insidieusement s’effriter. Toute cette tendresse et cette bienveillance durant les offices religieux ou lors des petites fêtes paroissiales - accompagnées de pains de maïs et autres barbecues - vont laisser la place à des jeux nocturnes bien moins recommandables. Costa Gavras fera naître un amour sincère, mais impossible en même temps que l’ignominie apparaîtra. Deux films, deux réquisitoires à charge d’une Amérique gangrenée de l'intérieur. Le terreau fertile de l'extrémisme et du racisme n’a pas changé à travers les époques - la peur de l’autre, l'intolérance...- seule la diffusion de la propagande a évolué avec le temps. Le message identitaire du “White Power” dans “La main droite du diable”, n’est rien d’autre que le prolongement moderne des croix en flamme, des églises incendiées et des paroissiens rossés de “Mississippi Burning”. Le folklore désuet des cagoules blanches a disparu, le klan a dû et le klan a su se réinventer. Son idéologie, qui se cantonnait autrefois aux états du Sud, n'a aujourd’hui plus de limites !