Mark Rydell, que vous ne connaissez pas, aime beaucoup filmer la nature, les roseaux, les nénuphars, les truites... Il aime aussi filmer les bons sentiments, la famille qui se décompose, la vie, la mort, la fille pénible, ce genre de choses...
Mais c'est l'exact contraire de Terrence Malick.
Mark Rydell est un tâcheron et il le sait, et c'est plutôt une bonne nouvelle, mais vous retrouvez ses petites tendances végétales aussi bien dans les Cowboys avec John Wayne que dans La Rivière avec Mel Gibson, faut pas croire, le bougre est tenace...
Ici, ce qui est émouvant, c'est que c'est un film que Jane Fonda offre à son père avec qui elle a toujours eu des rapports tendus.
C'est sûr qu'entre Henry Fonda, le patriarche à l'ancienne, même féru d'une pointe libérale (je parle bien sûr des critères américains en la matière) et la passionaria de la lutte anti-guerre du Vietnam, la relation n'a jamais été très simple...
Et bien, à un moment, la petite s'est dit qu'il fallait régler les choses, le type a passé ses 75 ans, sa carrière phénoménale est derrière lui, les combats de la petite aussi, alors elle finance une adaptation de pièce de théâtre qui pourrait lui offrir un rôle à sa mesure, tout en réglant quelques détails personnels. La bonne idée étant de donner à Katharine Hepburn le rôle de la mère, histoire de décaler le sujet sur les vieux et pas sur le père-fille...
Alors, oui, c'est indécent tous ces signaux de détresses, on a envie de leur dire que le cinéma n'est pas supposé régler leurs problèmes, mais il le fait si bien quand même...
Un vieux couple au bord d'un lac, une fille mal aimée par son père qui passe fêter ses 80 ans, un gamin laissé en garde, une truite mythique, qui ça peut intéresser, bordel ?!
Et bien, moi, toujours friand des décors de rêve bien partagés, des bougonneries de vieux presque morts, de dialogues savoureux entre deux légendes vivantes ou presque, et de tous ces petits détails qui font oublier le côté trop calibré de l'ensemble.
Bien sûr, la légende ne s'arrête pas là, le film connaîtra un succès inattendu dans son pays, et en outre, l'adaptation de la pièce sera récompensée aux oscars, mais aussi les deux acteurs principaux, ce qui, pour Katharine sera la quatrième fois, presque cinquante ans après le premier, mais pour Henry, ce sera tout neuf, le seul, l'unique, juste avant de crever la prostate en feu, avec la petite Jane à son chevet, et beaucoup de larmes dans les chaumières...
C'est beau Hollywood quand même, mais faut pas oublier que c'est un putain de chouette bougon dans ce film et que ça, c'est plus fort que tout le reste.
A noter aussi, mais ça n'a rien à voir, que la musique de Dave Grusin reprend ou préfigure un thème que je n'arrive pas à retrouver, je suis donc impatient d'avoir vos avis sur le sujet.