Avec son premier film, le réalisateur et acteur Amor Hakkar, qui n’avait pas grandi sur les chemins de briques jaunes des Aurès, y a construit une maison jaune pour constituer le réceptacle à des déconvenues très actuelles. On sera porté dessus qu’on le veuille ou non, mais c’est empreint d’une empathie tellement forte qu’on aura vite tendance à le vouloir.
On croirait Une Histoire vraie de Kubrick ; muni d’un hors-bord terrestre, le très stoïque personnage de Hakkar affronte la route, les Hommes, l’administration, s’escrimant respectueusement contre la paperasserie barbare à coups des rudesses de son berbère. Dommage que les ennuis soient à la fois le moyen et la finalité. Il délègue peu à son casting, de sorte que les autres protagonistes n’ont guère plus de valeur que la grande ligne définissant leur usage. Oui, malgré la trame éminemment émotionnelle, ils sont « usés », fantômes livides marchant dans les décombres de leur dénonciation impavide que le rythme et la musique excellente participent à vivifier.
On a l’impression de descendre un escalier en regardant La Maison jaune, comme si, faute de donner de la substance à ses murs ou à la lampe qui éclaire chichement les nuits comblées par le travail, Hakkar en faisait une métaphore par l’extérieur : l’aventure devient une odyssée qui devient un calvaire. Un mérite à porter sur ses talents de réalisateur que le temps a pour le moment failli à entériner.
Quantième Art