D'oppositions en oppositions, La Mauvaise Réputation tend à trouver la vérité absolue. La réalisatrice Iram Haq livre ici un récit très autobiographique à travers Nisha, une jeune norvégienne d'origine pakistanaise. Celle-ci alterne entre une vie d'adolescente libérée et celle d'une jeune fille exemplaire dans le cadre familial. Cependant, le jour où son père la surprend avec son petit ami, Nisha se retrouve emportée dans un tourbillon qui la ramène à ses origines. Un choc éducatif visant à blanchir l'honneur de la famille.
D'un côté, la Norvège, pays modèle de la modernité européenne; de l'autre, le Pakistan, pays islamique voisin de l'Inde, baignant dans une précarité générale. C'est à travers ce contraste autant géographique que politique et culturel que la narration se déroule.
Emmenée de force au Pakistan chez son oncle et sa tante, Nisha y découvre une rudesse et une fermeté auxquelles elle doit s'accomoder. Loin de tout, elle n'a pas d'échappatoire. Cette vie est très différente de celle qu'elle a pu connaître en Norvège.
La nuit apparaît comme l'espace temps des atrocités, thématique qu'on retrouve en Inde dans des films comme Slumdog Millionaire de Danny Boyle ou Lion de Garth Davis. Dans celui-ci, des miliciens surprennent Nisha et son petit ami qui s'embrassent dans une ruelle nocturne. Ils forcent la jeune femme à se mettre à nu et la photographie. Ils incarnent une forme de viol sans contact physique; et enferment davantage Nisha dans la honte.
Misra, le père, interprété par Adil Hussain, est magistral. La fermeté de son visage permet une lecture émotionnelle sur ses traits. Son regard dégage une incroyable puissance aussi imprévisible qu'effroyable. Il incarne l'amour autoritaire du père de famille, ne reculant devant rien pour laver son honneur et celui de sa famille. La punition qu'il inflige à sa fille se répercute davantage sur lui que sur elle. La honte et la disgrâce font place à la colère, au doute puis aux remords.
La réputation empatie de l'éducation. Si cette dernière est mauvaise, les conséquences le sont aussi et la réputation s'en retrouve salie. De là en découle la thématique principale du film et la problèmatique. Les parents doivent-ils faire totalement confiance à leurs enfants, au risque de mauvaises fréquentations ? Ou doivent-ils les placer sous surveillance excessive ? Quelle éducation est un modèle à suivre ?
Iram Haq signe un film miroir bouleversant de réalisme sur une culture méconnue du public européen. Elle dépeint une relation père-fille imprégnée d'un violent amour. Le mariage forcé ou la mort valent mieux que la honte, et c'est ce qui choque le spectateur. Le récit flirte avec un froid fatalisme. Mais la mort est-elle nécessaire à celui-ci ?