Projeté à l'ACID durant le Festival de Cannes, j'ai eu la chance de pouvoir assister à l'une des premières du film. Le réalisateur, Zhang Tao, était notamment présent pour un échange à la fin de la projection. Il expliqua son radical changement de parcours professionnel, de fonctionnaire chinois à réalisateur ou encore son casting amateur.
Une chute et toute sa famille la pense morte, ou plutôt l'espère. Portrait d'une vieille femme devenue de trop, rejetée par sa famille et ses propres enfants. Cruel contraste, elle priant pour le bonheur de ses enfants, et ceux-là priant, presque, pour que la mort vienne cueillir leur mère. Last Laugh ou Le rire de Madame Lin est la contemplation d'une ruralité chinoise; alliant noirceur et ironie, douceur et tragédie. Zhang Tao, réalisateur jusque là méconnu, signe ici un film à situer entre La Ballade de Narayama d'Imamura et Voyage à Tokyo d'Ozu. Le trépas prochain de la vieille femme permet de réunir ses enfants, ce dont elle se réjouit. Mais aucun d'eux ne semble disposé à s'occuper d'elle. Elle choisit alors d'adopter une réaction assez surprenante, le fou rire. Peut-être choisit-elle de rire de la situation plutôt qu'en être attristée ? Zhang Tao n'apporte pas de réponse. Il se contente d'insister sur ce rire gênant, puis insupportable jusqu'à en devenir macabre.
Jamais la caméra ne s'approchera dans l'intimité des personnages. Elle restera contemplative de l'action, toujours dans le dos des protagonistes. Le spectateur assistera à une désintégration familiale et au dernier rire, fatal, de Madame Lin.
Yu Fengyuan qui joue Madame Lin n'est pas une professionnelle. Elle a d'ailleurs confié à Zhang Tao sa gratitude pour ce rôle. Elle avait toujours rêvé d'interpréter un personnage. Cela accompli, elle pouvait mourir en paix.