Être roi implique le stoïcisme, surtout quand la souffrance ronge inexorablement votre corps. Ce corps qui ne vous appartient pas, mais appartient tout entier au pouvoir, à la France et à Dieu.
Être sans cesse en représentation, sous le regard des autres et savoir dompter la douleur.
La nuit seulement, dans la pénombre parcimonieuse, quand les courtisans dorment où s'amusent loin de Versailles, celle-ci peut s'exprimer et hurler toute son horreur, sa solitude, annonçant une fin inexorable et intolérable.
Ce film est le résultat d'un travail documentaire rare, d'une virtuosité parfaite à tous les niveaux et nous place dans une position insoutenable : Celle du spectateur impuissant, comme était impuissante la médecine en ce temps-là.
Le réalisateur Albert Serra ne fait pas dans la demie mesure : il nous place frontalement au pied du lit de velours rouge sang du roi qui se meurt, avec les courtisans incommodés par la vision de la déchéance et de la puanteur, avec les domestiques harassés de devoir rester debout, avec les médecins qui tâtonnent, se penchent, sentent et écoutent, dorment peu et discutent beaucoup entre eux, entre rancœurs, doutes et charlatanisme.
Séquences d'une intense émotion ou d'une grande indignation quand les "affaires courantes" viennent jusqu'aux oreilles épuisées du monarque ou que Madame de Maintenon ne se montre plus...
Jean-Pierre Léaud est magistral, exceptionnel dans un rôle où tout passe par des gestes minimalistes et des expressions qui montrent toute l'étendue des souffrances et des révoltes d'un homme qui agonise dignement. Les acteurs qui l'entourent semblent plutôt l'accompagner, à part le médecin Fagon, incarné avec justesse par Patrick d'Assumçao, déboussolé face aux ravages de l'atroce maladie qu'il refuse de diagnostiquer, enfermé dans un farouche déni.
Tout est minutieusement calibré : Les dialogues, les mouvements, les lumières mouvantes des candélabres, les bruits lointains qui parviennent jusqu'à la chambre, jusqu'au lit royal.
Film puissant, d'un accès difficile, il faut absolument se "laisser faire", et j'avoue, lors d'une certaine scène où le roi nous regarde, nous, avoir pleurer...
Une grand leçon de cinéma.

Elisariel
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le 13 juin 2017

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Elisariel

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