Dans The Mule, Clint Eastwood signe un retour magistral non seulement en tant que réalisateur, mais aussi en tant qu’acteur, avec une œuvre poignante. Une réflexion douce-amère sur les péchés, le temps qui passe et la quête de rédemption.


Au lieu de voir ce film comme une descente aux enfers, je le perçois plutôt comme une traversée du purgatoire – cet espace liminal où les âmes viennent se purifier avant d’atteindre la paix éternelle. Et Earl, le personnage principal, incarne à la perfection cet homme en quête d'absolution. Il a commis tant de fautes, négligeant sa famille, préférant le réconfort de ses passions personnelles et de ses amis à l’amour de sa femme et de sa fille. Il erre, solitaire et égoïste, jusqu’à ce que la vie lui offre un rappel brutal : sa petite-fille se marie, et la mort se rapproche.


Conscient que son crépuscule approche, Earl se lance dans une quête de rédemption, mais pas par le chemin le plus conventionnel. Il plonge dans le monde du trafic de drogue, devenant cette "mule" improbable. On le voit, avec un certain détachement presque comique, faire son chemin dans ce milieu brutal, apprécié pour sa discrétion et sa fiabilité. Ses actes sont condamnables, bien sûr, mais ses motivations sont, selon lui, nobles : payer les études de sa petite-fille et reconstruire un centre pour les vétérans de la guerre de Corée. Un homme en quête de rédemption, qui justifie ses travers par des actes d’amour, une dualité fascinante et profondément humaine.


Earl retrouve peu à peu sa famille. Le mari et le père absent deviennent enfin celui qu’il aurait dû être. Et, dans une belle ironie, il rencontre un agent de la DEA qu’il parvient à ramener dans le droit chemin, comme s’il aidait cette autre âme errante à éviter ses propres erreurs. Son arrestation devient alors la clé de sa libération, bien plus qu’une simple fin de cavale. Ce dernier plan où les barreaux s’effacent et où la caméra s’élève vers le ciel, c’est l’ultime envol de son âme, enfin libérée. Le crime est expurgé et les regrets dissipés.


The Mule, sous ses airs de thriller, nous propose un voyage bien plus intime et personnel. Clint Eastwood nous parle de la fin de la vie, de la rédemption et de la mort, des thèmes chers à son cœur, des sujets qui ont marqué son œuvre tout entière. Et comme toujours avec lui, l’émotion est subtile, discrète, mais frappe en plein cœur.

AntoineMrt
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le 29 déc. 2023

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