Disparition d'une vie

"Disparition" est un mot un peu fort mais vous comprendrez que c'est un parallèle à "Naissance".

Non, ici on devrait plutôt parler d'archivage d'une vie, des jeunes (et un peu moins jeunes) années de la femme de lettres, Colette.

Dernier petit préambule avant mon avis sur le téléfilm, je ne connais absolument pas l'Œuvre de Colette et je n'ai pas lu La Naissance du Jour, je ne jugerai que le film.

Jacques Demy, réalisateur des adulés (et à raison) Parapluies de Cherbourg et Demoiselles de Rochefort, a aussi connu des périodes bien creuses dans sa vie. En 1980, son dernier film est Lady Oscar qui, même s'il connaît son succès en Asie, est un échec en France. De plus, cela fait quelques années qu'il se penche sur son prochain gros projet, un retour à la comédie musicale avec Une Chambre en Ville qui sortira en 1982. Bref, tout ça pour dire que chez Demy, même si on s'attend souvent à du très bon, le pire n'est pas forcément à exclure (coucou Parking).

Téléfilm, La Naissance du Jour est donc l'adaptation du roman de Colette du même nom. Roman autobiographique, c'est Danièle Delorme qui campe le rôle de la romancière. Demy déclara "Mon adaptation est d'une fidélité absolue, tous les mots sont de Colette." De plus, le tournage se fait à la "Treille Muscate", la villa où Colette écrivit réellement La Naissance du Jour. C'est clairement ça le point fort du film, son adaptation. Alors peut-être que ceux qui ont lu le livre vont me dire que je dis n'importe quoi (ne vous gênez pas c'est important de corriger l'ignorance) mais même si je ne l'ai pas lu, je le ressens à travers ce film. Rapport au fait, qu'on tourne dans le sud, sur la plage, l'ambiance est parfaite finalement pour écrire sa biographie, mais aussi avec sa mise en scène. Le film est majoritairement dicté par une voix-off, celle de Delorme. Et parfois, les paroles de l'interprète de Colette chevauchent celles des personnages nous plongeant directement dans le livre où ele est l'unique détentrice des paroles de chacun.

Je ne sais pas s'il est parfaitement autobiographique ou en partie romancé, mais de ce que je vois du film, cet été a du être charnière dans la vie de la romancière. Dans sa villa, face aux pages, aux stylos et aux différentes personnes gravitants autour d'elle, Colette va petit à petit délaisser son passé. Non pas le renier, mais plutôt lui dire au revoir (elle va... tourner la page...).

L'ambiance du film est bonne, la mise en scène aussi, Demy ayant redécoré la villa avec des couleurs propres à son cinéma. La réelle faiblesse du long-métrage est finalement son statut de téléfilm. Je ne connais pas le budget mais je doute qu'il eut été particulièrement élevé. Cela se ressent, la plupart des plans sont resserrés, pour créer un côté intimiste autour de Colette certes, mais peut-être aussi car il n'y a pas réellement d'autres solutions. Les décors sont limités, bien qu'ils soient suffisants mais je trouve globalement les acteurs assez mauvais. Sorel et Sanda (pourtant superbe dans Une Chambre en Ville) ne procurent rien, pas une émotion et même si Delorme s'en sort bien, les scènes où elle n'est pas seule nous décrochent du film.

La Naissance du Jour, bien que plein de bonnes intentions quant à adapter le livre est bien trop limité dans sa dimension de téléfilm. Peut-être pas assez de budget, peut-être même pas assez d'envie de la part de certaines personnes travaillant sur le film, notamment les acteurs, il est pourtant très loin de détrôner l'inimitable Parking, œuvre parfaitement pathétique et drôle.

A voir sur le site de l'INA.