Deux films en un qui se parasitent
Aaaahhhh, l’année 2011 !! Comment l’oublier avec tout le tapage qui avait été fait sur le remake de La Guerre des Boutons ? Un projet de longue date qui a engendré une véritable bataille pour l’obtention et l’authenticité des droits d’adaptation, au point que, finalement, deux versions ont vu le jour. Une de Yann Samuell et une autre de Christophe Barratier, sorties à tout juste une semaine d’intervalle. Et quand je vous parle de tapage, c’est surtout au fait que ces films, contrairement aux pronostics, ont été des déceptions commerciales et surtout critiques. Pourquoi ? C’est ce que nous allons voir ici, avec la version de Barratier intitulée La Nouvelle Guerre des Boutons.
En pleine Seconde Guerre mondiale, un autre conflit sévit entre les villages de Longeverne et de Velrans. En effet, les enfants se battent sans cesse tels de véritables soldats, avec pour enjeu de récolter le plus de boutons du camp rival. Alors qu’en parallèle, le leader des Longeverne, Lebrac (Jean Texier) tombe petit-à-petit amoureux de la nouvelle venue dans le village, Violette (Ilona Bachelier), qui se trouve finalement être une Juive, cachée chez la mercière (Laetitia Casta) alors que l’ennemi se fait plus présent dans les parages.
En lisant ce script, l’intitulé La Nouvelle Guerre des Boutons prend alors tout son sens. La version de Christophe Barratier ne veut pas être une pâle copie du film original, se permettant d’y introduire une trame en plus, afin d’offrir un nouveau visage à l’œuvre de Louis Pergaud, déjà brillamment adaptée en 1962 par Yves Robert. Et il faut bien l’avouer que sur le papier, cette trame sur une enfant juive cachée dans un village où les garnements mènent une tout autre guerre avait son charme. Et pouvait offrir au jeune public (car n’oublions pas que c’est principalement la cible de ce film) un peu de notre histoire et d’humanité via un divertissement. Seulement, un gros problème se dresse devant une telle idée : faut-il faire La Guerre des Boutons ou un film sur la Résistance ?
Problème donc de ce film qui n’arrive pas à trouver le juste équilibre entre les deux partis, se loupant dans les deux cas. Arrivant à un résultat des plus bancals :
- En tant que remake de La Guerre des Boutons, le film de Christophe Barratier reprend bêtement les grandes scènes du modèle (l’assaut nocturne des Longeverne à Velrans, la cuite de Petit Gibus, l’idée des boutons, la cabane des Longeverne, la trahison de Bacaillé, la fugue de Lebrac…), n’évitant pas la vulgarité, avant de laisser la place au film sur la Résistance. Mais en faisant cela, le long-métrage abandonne les enfants, pourtant héros du film, pour mettre en avant les adultes, joués par des stars nationales (Guillaume Canet, Laetitia Casta, Kad Merad, Gérard Jugnot…). Et pour une Guerre des Boutons, c’est un comble !
- En tant que film sur la Résistance, la version de Barratier s’autorise un final où chacun a un rôle à jouer pour protéger la petite Violette. Un moment véritablement héroïque mais qui, avec l’ambiance générée par le côté La Guerre de Boutons, se montre bien trop enfantin et niais pour amuser.
Du coup, les minutes défilent sans que nous soyons véritablement happés par ce qui se passe à l’écran. Attendant impatiemment de voir une gaminerie à la Petit Nicolas qui puisse faire sourire, sans qu’elle n’arrive, malheureusement. Cela se suit sans déplaisir, loin de là ! Mais l’humour peine à pointer le bout de son nez.
De plus, on ne peut pas dire que les jeunes acteurs soient vraiment à la hauteur de ceux de la version d’Yves Robert. Qui étaient d’un naturel incomparable. Ici, on sent bien que les répliques sont du par cœur, du récité. Manquant en plus de cela d’un charisme qui leur aurait été profitable (Lebrac, très mauvais choix de casting !). Une bien belle déception, d’autant plus que Christophe Barratier avait déjà montré par le passé savoir s’occuper d’un film avec des jeunots, et de sortir le meilleur d’eux-mêmes (Les Choristes). Encore une fois, il faut se reporter aux acteurs adultes, beaucoup plus expérimentés et qui s’amusent un minimum de ce film. Mais il s’agit d’un film La Guerre des Boutons. Et ce sont les enfants que nous sommes venus voir, pas des célébrités qui se remarquent au moins deux fois par an !
Il ne reste plus qu’à cette nouvelle version les décors, les accessoires et les costumes, pour donner de la crédibilité à l’époque durant laquelle se déroule le film. Et de ce point de vue là, le réalisateur ne nous a jamais déçus. Par contre, c’est sur le plan musical que La Nouvelle Guerre des Boutons se loupe. D’une banalité affligeante, nous sommes bien loin des autres œuvres de Barratier (Les Choristes, Faubourg 36).
Que faut-il dire de cette Nouvelle Guerre des Boutons ? Que son réalisateur a voulu innover et offrir un divertissement qui s’éloigne de son modèle. Un fait qu’il faut souligner ! Malheureusement, l’ambition était gargantuesque et Barratier s’est retrouvé avec un projet trop difficile à maîtriser, à tel point qu’il n’a pu éviter de faire deux films en un, et que les deux partis se parasitent mutuellement. Donnant à La Nouvelle Guerre des Boutons un aspect bancal, commercial et fait à la va-vite. Pas étonnant que le long-métrage n’ait pas aussi bien marché que l’espérait les producteurs. C’est juste le côté « film sur la Résistance » qui a fait toute la différence auprès du public (ce qui en dit long sur le manque de qualité de son rival…).