Un double sentiment m'étreint après cette rétrospective Kinuyo Tanaka. Tout d'abord le bonheur d'avoir découvert cette filmographie de réalisatrice enfin ressuscitée, filmographie d'une richesse, d'une variété et d'une densité en terme de qualité assez incroyables. Mais aussi la tristesse d'être arrivé au bout de ces six œuvres en sachant qu'il n'y en a pas d'autres à découvrir.
Ce cinquième film est comme toujours chez Tanaka un portrait de femme, d'une femme pour parler de toutes. Ici elle poursuit en quelque sorte le travail achevé cinq ans plus tôt par l'un de ses mentors, Mizoguchi, qui avait à plusieurs reprises, et jusqu'à son ultime "Rue de la honte", évoqué les maisons closes et le sort des geishas. Elle procède à un "Que sont-elles devenues ?", décrivant leurs vies après l'interdiction de ces lieux et le "parcage" de ces femmes dans des maisons de réhabilitation.
Hypocrisie de la société, rapports homme-femme, difficulté pour ne pas dire impossibilité de ces êtres détruits physiquement ou/et psychologiquement, tout est ici traité avec une grande sensibilité mais sans œillères. Tout y compris une romance aux apparences idylliques qui permet de mieux signifier les dégâts faits sur les cerveaux et les cœurs, le temps long indispensable à la réparation.
Et étonnamment on peut également entrevoir dans cette "Nuit des femmes" une page du cinéma en train de s'ouvrir, entre autre portée par Nagisa Ōshima, avec cette description d'une nouvelle jeunesse, celle qui allait refuser de se soumettre.