Un film marquant, assurément. Loin d'être simple ou stéréotypé. Un polar couplé à un film social. La condition de la femme est plus l'enjeu du film que l'enquête à proprement parler, ou plutôt l'enquête policière justifie une réflexion sur la condition féminine (et les représentations sexistes tenaces). Enquête méticuleuse mais dépourvue de solution - forcément - à l'image du film. Une happy-end aurait été trop pratique et, comme toute bonne tragédie qui se respecte, on connaît le dénouement dès le début. L'enquêteur fait ce constat glaçant à propos des différents et nombreux - étonnamment nombreux - suspects : "Tous auraient pu la tuer". Mention spéciale à Bastien Bouillon, avec sa trogne de gosse, sa tristesse patente, sa maladresse déroutante (il faut voir comment il annonce la mort de leur fille aux parents) accompagnée d'une empathie rare. Si les policiers sont comme ça, tant mieux (ils le sont...). D'ailleurs les policiers sont filmés avec bienveillance (le pot de départ qui ouvre le film pourrait être celui de n'importe quel fonctionnaire retraité).
La réalisation sobre, proche parfois du documentaire, le calme de ce cadre provincial contrastent avec la violence de chacun (flics et suspects). Les jeunes ont des moeurs que les adultes ont renoncé à comprendre... Finalement c'est aussi un film sur le choc générationnel.
Bouli Lanners impeccable comme d'habitude dans un rôle de quinqua hypersensible et perdu qu'il affectionne.
Je suis surpris par la justesse du film quand le pitch pouvait faire penser à un (bon) téléfilm de TF1. Mais c'est Dominik Moll aux commandes.
Et, ajoutons que la planque finale sur le lieu du crime (sans divulgâcher) "fout les poils" par sa finalité et son haut potentiel émotionnel.