Le charme discret de la bourgeoisie
La bourgeoisie me fascine au cinéma.
Bien entendu, je ne parle pas des traitements complaisants comme le font Guillaume Canet ou autres petits malins du paysage cinématographique français d'aujourd'hui, mais de Fellini, Bunuel, Chabrol, Visconti... Ceux qui ont filmé les bourgeois avec une attirance extérieure, en promettant d'en faire une analyse sociétale impartiale et complète, sur leurs mœurs, l'abîme derrière la dorure...
Une oeuvre pertinente sur la bourgeoisie s'apprécie comme le bon jazz : de l'ennui ressort la plus belle des mélancolies - une ambiance de fin de soirée superficielle où chaque personne qui en ressort fait de suite le point sur la vacuité de sa vie (je grossis le tableau).
Et La Party, c'est comme le bon champagne et le bon jazz, ça pétille, c'est savoureux, ça se déguste (parce que, pour ma part, je n'ai commencé à vraiment apprécié que lorsque la fête commence), et à la fin, il y a cette ambiance de fin de soirée mélancolique, romantique et jazzy, illustrée allégoriquement par la grâce de Michelle Monet.
Peter Sellers, il est un peu comme le spectateur lambda du film, l'intrus dans la fosse aux serpents.
Il ne tombera jamais dans la lourdeur humoristique qui aurait pu s'offrir à lui (et à Blake Edwards), il restera jusqu'au bout fin et élégant, tout en enchaînant des comiques de situation hilarants et absurdes. Cela nous rappelle parfois Chaplin, mais Blake Edwards n'a pas la fâcheuse manie du Charlot : il ne tombe jamais dans le dégoulinant pathos. C'est tout à son honneur.
D'ailleurs, si le film est si pertinent, c'est probablement parce que le cinéaste a bien côtoyé l'univers hollywoodien, ses starlettes, ses producteurs misogynes, ses acteurs ringards.
Mais le film est très léger, il ne se prend pas au sérieux, et c'est d'autant plus beau car il en ressort un certain humanisme, une certaine spiritualité. Chose que beaucoup de cinéastes ont voulu atteindre d'une manière écrasante et sans la subtilité de Blake Edwards. Encore une fois, c'est tout à son honneur, et cela me donne bien envie de me précipiter sur la filmographie du cinéaste.
Une bulle de champagne dont le bon goût reste longuement en bouche, et je vous assure que je suis difficile en matière de champagne.