Haters gonna hate.
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le 11 janv. 2011
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Voilà une œuvre qui a fait couler beaucoup d’encre à sa sortie, autant que de sang sur les écrans. Il suffisait à l’époque d’évoquer simplement ‘’La Passion’’ pour entendre l’avis de chacun sur la question. Ayant vu le film ou non. Tout, ou presque, a été dit sur cette troisième réalisation de Mel Gibson, qui malgré ses défauts à le mérite d’assumer son jusqu’au-boutisme. C’est le moins que l’on puisse dire.
Le parti prit est simple, Jésus a souffert pour le salut de l’humanité, et la caméra de Mel Gibson se charge de montrer brutalement ce que furent ses derniers instants. Durant un peu plus d’une heure est donc proposé au spectateurice le chemin de croix d’un homme, mortel, massacré par des légionnaires romains saouls, sous les grondements injurieux des habitants de Jérusalem, lui reprochant de s’être autoproclamé ‘’roi des juifs’’.
Film exigeant, qui n’est pas à mettre devant tous les yeux, ‘’The Passion of the Christ’’ c’est avant tout une expérience. Difficile à suivre, ce n’est pas un délire goret où litres de sang et tripailles permettent un défouloir visuel. Non, ici c’est du sérieux, et ce qu’essaye de montrer Mel Gibson c’est à quel point il aborde cette affaire avec conviction. C’est sa foi qu’il transpose à l’écran. Et elle est d’une austérité glaçante.
Aucuns détours n’est permis par ce métrage, une fois lancé la fascination s’installe, pas de demi-mesures. Déjà, le fait que les dialogues soient récités en hébreux, en latin et en araméen ancien, soit les langues parlés dans le contexte des Évangiles, démontre une volonté d’authenticité non feinte, de la part d’un metteur en scène en ayant fait sa marque de fabrique. Les accents dans ‘’Braveheart’’, les languages pré-colombiens amalgamés pour ‘’Apocalypto’’, indique un besoin de proposer des œuvres ancrées dans une réalité historique.
Pas de miracles, aucunes démonstrations ‘’magiques’’ de la part du Christ, juste un homme accusé de blasphème, et sacrifié sur l’autel de l’obscurantisme. Face à un occupant romain qui pédale dans la semoule. Le voilà le nerf de la guerre, cette dimension sulfureuse reproché au métrage. Les Romains n’ont qu’un rôle prestigieux à Jérusalem, faisant presque de la figuration, manipulés par les autorités de la ville sainte, bien décidées à mettre fin aux agissements de Jésus.
C’est là aussi qu’entre en compte les dérapages de Mel Gibson, qui ne peuvent être ignorés. Sous l’emprise de l’alcool, lors d’une arrestation, il eut des propos jugés antisémites. Ce qui n’arrangeât rien au fait que de nombreux spectateurs virent dans la persévérance des autorités Hébreux pour faire condamner Jésus, un propos antisémite sous-jacent. Sur les traces de cette vieille rumeur qui veut que ‘’les Juifs ont tué Jésus’’.
Or, au début du premier siècle de notre ère, en Judée, la majorité des populations sous le joug de l’Empire romain, sont Juifs. Tout comme Jésus, qui est en plus dans la continuité de la religion abrahamique. Les Romains avaient une politique d’expansion englobant les peuples et leurs cultures. S’immisçant finalement très peu dans les affaires religieuses, un gain de temps pour convaincre les populations vaincues à rejoindre l’Empire. Sans prosélytisme ni persécution.
Dans le Évangiles, comme dans le film, les prêtres du Temple de Jérusalem amène une première fois Jésus à Ponce Pilate, qui refuse de le condamner. Ils vont ensuite voir Hérode, qui s’en fiche un peu. Puis ils retournent voir Pilate. Ce petit jeu qui se met en place a visiblement posé problème, comme le fait que ce soit les prêtres du Temple qui sont montrés en train de donner les trente pièces à Judas.
Matthieu 26 : 14-15 : ‘’Alors l’un des Douze, nommé Judas Iscariot, alla trouver les chefs des prêtres et leur dit : « Que voulez-vous me donner si je vous le livre ? ». Ils lui proposèrent trente pièces d’argent. Dès lors, Judas cherchait une occasion favorable pour le livrer.’’
Une tempête dans un verre d’eau donc, puisqu’il suffit de jeter un œil dans les Évangiles pour réaliser que tout ce qui est montré dans ‘’The Passion of the Christ’’ est présent dans les textes. C’est donc plus à la personnalité tortueuse de Mel Gibson que le film tient sa réputation. Et là on tombe dans le domaine privé, soulevant cette fameuse question : ‘’Doit-on séparer l’auteur de l’homme ?’’. Vaste débat auquel je ne participe pas.
Comme tout cinéaste qui met sa foi en image, c’est une part de son être qu’il partage. Ce qu’il nous montre est comment il interprète les écrits. Il en va de même pour Cecil B. de Mille ou Martin Scorsese. Soit une mise à nue et une prise de risque non calculée, car tout peut ressortir d’une telle démarche. Malheureusement le film fût entaché de polémiques futiles, qui sont aujourd’hui les premiers éléments auxquels on pense lorsqu’est évoquée ‘’La Passion…’’.
Le talent de metteur en scène de Mel Gibson n’est plus à prouver, chacun de ses cinq longs métrages étant une réussite indéniable. Il y aborde d’ailleurs toutes ses obsessions, déclinant ses thématiques par le drame familiale (‘’The Man Without a Face’’), l’épique libertaire (‘’Braveheart’’), ou bien encore la fresque eschatologique (‘’Apocalypto’’), en passant même par la Seconde Guerre mondiale et une réflexion magistrale sur la moralité (‘’Hacksaw Ridge’’).
Tout cela se retrouve au cœur de ‘’The Passion of the Christ’’, où palpite des thématiques motrices, faisant naviguer le récit. Jésus, figure paternelle auprès de ses apôtres, trahit par l’un des siens, rêve de voir une Judée libre, dégagée d’un Empire Romain sur la pente déclinante. Mais le Christ reste droit, se tenant à ses valeurs et à sa rectitude morale, subissant dès lors les coups répétés de ses bourreaux.
Si le film est jonché de flashback, la trame principale débute par l’arrestation de Jésus au mont des oliviers, puis l’acharnement des prêtres qui veulent le faire condamner. Une fois fait, une séquence particulièrement hardcore montre des légionnaires en roue libre totale s’acharner avec des fouets sur le Christ. Avant de prendre des fouets agrémentés de lames métalliques, qui lui lacèrent le dos. Puis c’est la pose de la couronne d’épine, et le bal de l’horreur est ouvert.
Que c’est éprouvant. Côtes apparentes, tuméfié, épuisé, maculé de sang, Jésus porte littéralement sa croix, comme il le peut. Il chute de nombreuses fois, se relève, subit les coups et les brimades de légionnaires picolant allégrement. Sous les rires, les injures et les cris, il parcourt un chemin interminable. La mise en scène de Mel Gibson prenant bien le soin de ne rien faire rater des souffrances aux spectateurices, tel une tierce, nous prend à témoin.
Sans crier au chef-d’œuvre, il est beaucoup trop extrême pour ça, ce n’en est pas moins une expérience unique. Jamais un metteur en scène n’avait mis Jésus en lumière sous ce jour. Si dans ses audaces il se rapproche un petit peu de la démarche de ‘’The Last Temptation of Christ’’, c’est pourtant autre chose qui est proposé. Avec un respect intransigeant des écrits sur lesquels se bases son histoire.
En ce sens, la construction de Jésus est assez classique. Jim Caviezel lui prête ses traits passe-partout, le rapprochant d’une iconographie déclinée dans l’art chrétien. Cheveux long, barbe, d’une grande sagesse, il est des plus convenu. La torture physique et psychologique dans lesquels il est plongé est ce qui marque une réelle différence. Même si, selon les écrits, et sur les Passions présentent dans les lieux de cultes, les représentations du Christ sont sanglantes.
La vision de Mel Gibson est finalement très proche de ce qui se trouve dans les Évangiles. En faisant à ce jour l’une des représentations cinématographiques de Jésus de Nazareth des plus aboutie. Transposition méticuleuse de la Bible et de la culture populaire chrétienne, offrant une œuvre sans concession, qui ne peut laisser indifférent. Ce qui est là sa force principale.
Malheureusement, au-delà de la Passion, l’ensemble peine un peu à convaincre. Les personnages sont par trop caricaturaux, comme Barabbas, le forçat condamné à mort, que la foule fait libéré au défaut d’un Jésus définitivement condamné. L’interprétation est peu convaincante, le comédien en fait des caisses, ce qui tranche avec le sérieux de l’entreprise.
Il y a comme ça de temps à autre, tout au long du métrage des passages un peu grotesques, comme s’ils n’intéressaient pas Mel Gibson, concentré sur les tortures de son Christ. Il en va ainsi de même pour Ponce Pilate, auquel le comédien bulgare Hristo Shopov ne parvient à donner une texture convaincante. Il y a peut-être là une volonté de la part du cinéaste de présenter des personnages caricaturaux pour les opposer à la nature sacrée du Christ. Mais si c’est le cas, c’est un peu raté.
En soit ‘’The Passion of the Christ’’ reste un très bon film, jonché par-ci par-là de moments un peu hors ton, mais qui dans son ensemble fonctionne assez bien. Sa singularité en faisant sans doute un objet de tous les fantasmes, plus ou moins justifiés, mais qui sont la garanti de découvrir une œuvre qui ne craint pas d’aller jusqu’au bout de son propos.
L’expérience tua la carrière de Jim Caviezel, qui depuis n’a jamais trouvé de rôle d’importance. Il met ça sur le fait qu’assumer sa foi à Hollywood c’est mal vu. Mais il en fût de même pour Willem Dafoe dans les années suivantes de la sortie du film de Scorsese. C’est peut-être don plutôt le manque de charisme du comédien, qui incarne un Jésus somme toute assez fade. Loin de l’intensité d’un Dafoe ou d’un Von Sydow.
L’aura négative de ‘’The Passion…’’ a aussi un impact sur la carrière de Mal Gibson, qui de 2004 à 2010 disparait des écrans. Après ‘’Apocalypto’’ en 2006, il ne reviendra à la réalisation que dix ans plus tard avec ‘’Hacksaw Ridge’’. ‘’The Passion…’’ fût donc en son temps une œuvre déterminante, dont les conséquences auront impacté le sort de son réalisateur et de son acteur star. Ce à quoi s’ajoutèrent les déboires hors plateau de Mel Gibson.
Le métrage traine toujours dans son sillage une réputation noire, injustifiée dans la plupart des cas, car ce n’est qu’un film. Soit le résultat obtenu par un cinéaste dévot voulant partager sa conception de la foi avec son public. En résulte une œuvre inégalée sur le plan de la concordance avec les récits religieux, dont chaque vision garanti le même effet : Un mélange de dégoût, de fascination, et d’admiration pour le type qui a été capable de capturer cette horreur inouïe sur pellicule.
L’histoire ne s’arrête pas là. En effet, est déjà prévu pour une sortie en 2021, la suite des aventures de Jésus, dans ‘’The Passion of the Christ : Resurrection’’. Qui s’attardera sur les trois jours qui passés entre la mort de Jésus et sa résurrection. Ce n’est pas dans les Évangiles officielles, seule l’évangile apocryphe de Saint Thomas évoque son passage en Enfer… Un projet particulièrement alléchant sur le papier… To be Continued…
-Stork._
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le 1 mai 2020
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