Fruit d’un projet colossal de longue haleine, La Passion Van Gogh est une œuvre aussi passionnante de par sa production que dans son résultat final. S’appuyant sur près de 800 lettres écrites par l’une des plus grandes figures de l’impressionnisme, les réalisateurs Dorota Kobiela et Hugh Welchman retracent les derniers jours de la vie de Vincent Van Gogh de manière singulière, s’éloignant ainsi des biopics conventionnels qui fleurissent ces dernières années. Visuellement épatant, le long-métrage est une véritable bouffée d’air frais tant il se révèle original dans son pari esthétique.



Démesure esthétique.



Pour citer quelques uns des chiffres faramineux qui gravitent autour de La Passion Van Gogh, évoquons sa genèse sur Kickstarter, ses 120 reproductions de tableaux du peintre, les 10 jours de travail pour monter ne serait-ce qu'une seconde du résultat final, son équipe de près de 800 personnes, son nombre incroyable de plans peints à la main, et cætera. Projet pharaonique donc, le rendu visuel d’un telle campagne de production est à la hauteur des moyens déployés ; l’équipe de production parvient à donner véritablement vie à la peinture de Vincent Van Gogh. Les peintres de l’équipe reproduisent pour ce faire chaque plan d’un long-métrage tourné en images réelles et insufflent de ce fait à la peinture du maître, qu’ils pastichent, le mouvement que ce dernier n’a cessé de poursuivre toute sa carrière. En ce sens, la réalisation de Dorota Kobiela et Hugh Welchman prolonge le mouvement artistique de Van Gogh, consacrant par là-même une formidable intertextualité entre peinture et cinéma. Bien plus qu’une œuvre cinématographique picturale, La Passion Van Gogh est une toile « cinématographiée ».


En ayant fait de la peinture l’objet central de ce biopic, les deux réalisateurs sont parvenus à rendre un hommage vibrant et tout à fait hors-norme à l’œuvre du peintre disparu en 1890. Reproduire le style de l’artiste pour brosser son portrait est un véritable coup de maître qui permet à la réalisation de se démarquer en proposant une expérience esthétique nouvelle et proprement émouvante. La surprise est telle que l’on en oublie parfois la narration qui, pourtant, jouit elle aussi d’un traitement esthétique intéressant.



Les enquêtes d'Armand.



Si La Passion Van Gogh entend partager les derniers instants de la vie du peintre, les réalisateurs privilégient un récit parcellaire et rétrospectif, croisant ainsi les temporalités sur fond d’enquête. La réalisation mêle donc deux temps, celui de la quête d’Armand Roulin, fils du postier attitré de Van Gogh et parti sur les traces de sa disparition, et celui des derniers jours du peintre et de la genèse de sa disparition. Le récit au passé est traité en noir et blanc, ce qui permet de mettre en valeur un merveilleux travail sur les lumières au sein des peintures qui composent chaque plan. Notons par ailleurs que le travail d’animation est lui aussi phénoménal, en témoigne la multitude de détails mouvants, mais aussi certains plans visuellement incroyables, comme celui où l’un des protagonistes voit le reflet de son visage dans l’eau, le fait disparaître, avant d’enfin le voir reparaître.


La structure narrative est par ailleurs elle aussi captivante et le récit est suffisamment bien rythmé pour que le spectateur se laisse prendre par les émotions qui entourent la disparition presque anonyme de l’une des figures majeures de l’histoire de la peinture. L’enquête du jeune Armand fonctionne bien et ne souffre d’aucune longueur, ne perdant par ailleurs jamais le spectateur dans son traitement du temps. Cette figure de jeunesse qu’est Armand permet d’appréhender avec une belle humanité la disparition de l’artiste, malgré le mystère qui environne encore les causes réelles de son décès. Saluons enfin Pierre Niney qui prête sa voix à la version française de Loving Vincent et qui, on l’espère, permettra d’aider cette belle réalisation à trouver son public.


En définitive, La Passion Van Gogh est le résultat d’un travail de production colossal, dont le rendu esthétique ne cesse d’émerveiller le spectateur. Hugh Welchman et Dorota Kobiela signent un portrait d’artiste aux allures de coup de cœur et parviennent à prolonger véritablement la passion que suscite le travail, lui aussi pharamineux, du peintre hollandais.


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vincentbornert
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le 9 oct. 2017

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