Depuis que je suis devenu vieux, quand je vais dans un cimetière, j‘ai l’impression de visiter des appartements !
Je ne connaissais pas le tandem féminin qui a mis en scène et écrit cette histoire, mais leur récit m'a touché, ému, leurs images étaient convaincantes, et cette histoire "de vieux" est attachante... Des films sur les personnes âgées, sur les maisons de retraite, il y en a des tas mais celui-ci est subtil, bien rythmé et en même temps si réel
Le petit vieux bougon nullement assagi par l'âge avancé, revient de l'hosto et se rencontre que son autonomie est derrière lui... Son infirmière elle n'en finit pas de ruminer la mort de son bébé, au point que son amoureux la quitte et qu' elle prend en charge son patient chez elle. Le fils du senior a profité de son hospitalisation pour déménager tout ce qu'il y avait chez lui,, jusqu'aux plantes qu'il cajolait, chérissait.... Les situations psychologiques sont très intéressantes à suivre puisque chacun trouve en l'autre du réconfort, même involontaire...
On est loin certes de la perfection... Les scènes de lit font penser aux films américains prohibés avant la libération de censure de 1970 : d'une fadeur et invraisemblance presque coupables de nos jours, stupidement pudibond en un temps où les nombrils féminins n'ont plus de secrets pour personne...
Quelle plaie aussi que cette musique inutile est bêtement aussi envahissante et déplaisante ! Comme celle du fils Chabrol quand il a commencé à pourrir l'ambiance sonore des films de papa... On doit subir aussi la permanence d'un bruit de fond étrange comme venu de l'au-delà et qui m'a rappelé les vieilles caméras ou projeteurs dont le bruit rappelait celui des bicylindres Citröen... Ingénieur du son en grève ?
La fin est évanescente et on ne s'est pas beaucoup torturé les méninges de ce côté-là, mais le principal est l'admirable prise en charge de leur rôle par Michel Bouquet : archi célèbre, presque centenaire (1925-2022) : on devine son âge mais il cabotine encore en s'isolant des autres pensionnaires d'une maison de retraite, et en mordant le bras de l'infirmière voulant lui ôter son casque audio...
Je n'aime pas le titre "monstre sacré" qu'on attribue à Bouquet (rien à voir avec Carole) : plutôt un génial ancêtre ou pionnier du théâtre et du cinéma : il excellait dans les rôles de salaud, du méchant genre flic revanchard, sournois... Sa diction était à nulle autre pareille et on reconnaissait sa voix dès le premier mot prononcé : ses voxographies sont aussi nombreuses que ses apparitions sur scène ou grand écran...
Sa vois résonne encore à mon oreille comme s'il était là...
Mais coup de chapeau aussi à celle qui lui donne la réplique avec énergie et conviction, Florence Loiret-Caille, qui n'en est pas à son premier rôle non plus, et qui est tout simplement excellente, divine de réalisme....
Le duo fonctionne à merveille et fait oublier tout le reste. Je ne dirai pas autant de bien des rôles masculins : Plier et Caravaca, il est vrai plus secondaires....
Ce film suisse n'a semble-t-il pas été largement distribué car il n'a été vu à sa sortie que par
41 717 spectateurs... Injuste : il est pourtant bien meilleur que de nombreux téléfilms traitant du même sujet ingrat .... Dommage.
TV5 Monde le 10.04.2023-