Une histoire est intéressante à partir du moment où elle respecte une forme de cohérence interne. Qu'importe le postulat de départ, finalement (voyage dans le temps, zombies violeurs de dinde transgéniques, présence diabolique, réincarnation, space-opéra pyjamesque, que sais-je ?) du moment que qu'une forme de logique, d'intégrité au postulat de départ, subsiste.
Le problème de cet « piel que habito » est qu'il ne sait jamais vraiment sur quel pied danser. Pas vraiment conte (dont il ne respecterait alors aucun des codes ou morale, si ce ne serait, alors: « le transgénique c'est mal, hou !! », mais venant d'un transgressif comme Almodovar ce serait un peu court, vous en conviendrez), pas assez fable (ou alors bien trop sage ce qui serait la aussi un paradoxe), pas du tout thriller psychologique (parce qu'alors complètement ridicule), le film peine à trouver sa place.
En tout cas, je ne lui en ai trouvé aucune.
Pour s'accrocher d'une manière ou d'une autre à cette accumulation d'évènements incroyables, il faut pouvoir ne pas s'attacher aux détails. Une histoire peut tourner autour d'un point extraordinaire. Deux et déjà on s'approche d'un gouffre artistique que seuls un grand talent de mise en scène ou autre festin visuelle peuvent sauver. Ici, les évènements « incroyables » se comptent par paquets de 12 (voir à ce sujet le très bon résumé par le menu de Méléna, si vous voulez une idée de l'étendu des dégâts, et cela uniquement si vous êtes sûrs de ne jamais vouloir le film, et le problème de cohérence interne dont je parlais au départ est flagrant.
Scénar en bois sous une apparence rusée, OK. Mais alors, que reste-t-il au film ?
Le roman d'origine. Porté aux nues par un de mes éclaireurs les plus chers, je suis du coup très dubitatif, suite aux réserves que je viens de formuler. J'ai bien peur que la trame originale soit respectée et donc fidèle au désastre narratif que je viens de décrire, et, j'en reviens à ce que je décrivais plus haut : il faudra au livre de sacré qualités annexes pour rattraper le coup.
Un couple d'acteur plutôt agréable, qui parvient à cette (réelle !) performance de rendre crédible certaine scènes, ou en tout cas donner du corps à l'histoire. Respect.
Une ambiance plutôt intéressante. Eloignée semble-t-il de celle du livre de Jonquet, elle n'en est pas moins singulière et apporte ici aussi, comme pour le jeu des acteurs, un peu d'épaisseur à l'ensemble.
Il semble que décidément je doive me faire à la raison que je reste à jamais éloigné de l'univers Almodovarien, de ses déviances et ses excès. Allez savoir, c'est peut-être dû à la langue, j'ai toujours eu beaucoup de mal avec l'espagnol.
Puis bon, je ne résiste pas au plaisir de vous citer la mère des incohérences, qui n'a été, semble-t-il relevé par aucun SensCritiqueur jusqu'ici. Un grand chirurgien/chercheur qui ne change pas de voiture en six ans, ça tient pas debout, d'abord.
Moralité, les histoire de double parfait, c'est un vrai semblable.