Meurtre d'un réalisateur américain.
A l'annonce d'une nouvelle adaptation du célèbre roman de Pierre Boule dirigée par Tim Burton, plus d'un cinéphile a mouillé son slip de bonheur, rêvant à ce que le papa de Vincent et d'Edward pourrait faire avec un tel matériau. D'autant qu'un projet aussi énorme paraissait tomber à pic, l'univers du cinéaste commençant à s'enliser dans une certaine routine comme le laissait entrevoir le magnifiquement vide "Sleepy Hollow". Si les bandes-annonces refroidirent nos ardeurs en deux temps trois mouvements, ce n'était rien comparé au massacre qui allait se dérouler sous nos yeux meurtris.
Totalement prisonnier de sa nature de blockbuster estival dans ce qu'il a de plus calibré et puéril, gangréné par les desiderata du studio qui le produit, "La planète des singes", de projet fichtrement excitant, va se transformer petit à petit en cauchemar, en assassinat pur et simple d'un cinéaste d'ordinaire anticonformiste. C'est bien simple, on ne retrouve absolument rien du magicien nous ayant offert des chefs-d'oeuvres de poésie comme "Ed Wood" ou "Edward aux mains d'argent", et qui avait si bien détourné la notion de blockbuster avec un second Batman magistral. On sent à chaque plan que Burton n'en a absolument rien à carrer de ce qu'il filme, à tel point que l'ensemble aurait pu être shooté par un assistant que l'on ne verrai même pas la différence.
Jetant à la poubelle le roman original au profit d'un récit messianique sans aucun intérêt, le scénario (que l'on sent retouché à de multiples reprises) est d'une connerie sans nom et ne raconte absolument rien, vidant le film de Schaffner de toute sa verve et de sa substance, se contentant, en guise de regard critique sur notre société, de gags moisis autour de la vie quotidienne de ces singes "évolués", nous présentant des personnages à peine dignes d'une série Z, tristes reflets de protagonistes autrefois si complexes, la palme allant à des indigènes doués de parole (faut bien vendre le film) et à un gorille aux traits... japonais (le grimaçant Cary Hiroyuki-Tagawa).
Quant au casting, le film accomplit l'exploit de rendre des comédiens talentueux tout bonnement exécrables. Tim Roth gesticule dans tous les sens en pure perte, Helena Bonham Carter cabotine comme une folle, Estella Warren, aussi jolie qu'inexpressive, n'est là que pour tuer dans l'oeuf la love story contre-nature voulue par Tim Burton et Mark Wahlberg compose un héros fade et caricatural, loin du charisme de Charlton Heston.
Bourrée de pognon mais étrangement plus kitsch que la saga tournée trente ans auparavant, tournée dans des décors loin de l'étrangeté (naturelle) de ceux du film de 1968, cette nouvelle version de "La planète des singes" est un échec sur toute la ligne, dont on ne retiendra que les excellents maquillages de Rick Baker. Pour finir, une question plus personnelle: suis-je le seul a trouver Helena Bonham Carter sacrément attirante en guenon ?