La Plateforme a de multiples facettes, reflet des multiples étages qui composent cette prison dantesque qui lui sert d’intrigue. On se laisse imaginer que le réalisateur souhaite nous emmener dans un récit contestataire, qui s’illustre à travers un climat horrifique et délicieusement gore. Mais le film va bien au delà, il ne se contente pas de critiquer un système capitaliste, de caste qui laisse mourir de faim « ceux d’en bas ». Certes, on le voit personnifié par « L’Administration », cette entité omnisciente qui a enfermé ces prisonniers et les laisse se battre pour cette plateforme. Mais ce sont ces mêmes personnes qui ont construit la cruauté de ces lieux. Chacun des personnages, magnifiquement construits, apporte à cette prison cette noirceur, cette peur et ce chaos.
Vous voyez donc ici cette critique sociale clairement établie par le réalisateur: le cannibalisme, le mépris, la bienveillance désespérée… Sans faux-semblant, le récit se fixe à des caractères humains typiques de la société dans laquelle nous vivons. Chacun mange avec excès, chacun vit pour soi, sans penser à une union qui pourrait tous les sauver. Le réalisateur n’a pas eu peur de pousser les curseurs au maximum pour mettre en lumière ce dont chacun est capable pour sa propre survie.
Mais là où l’oeuvre prenait un sens très intéressant dans la majorité du film, la quête de justice des derniers instants fait perdre au film tout son attrait. L’auteur a su nous captiver, mais délie le propos originel pour nous amener dans le purgatoire, le dernier étage, un sous sol dont on ne remonte plus. La réflexion tourne alors au mysticisme et ne laisse que peu d’option pour le spectateur. Certes, la critique sociétale menée tout au long du film est grossière mais si bien brodée qu’elle réussissait à construire en nous une véritable dialectique. Malheureusement, l’auteur se perd complètement sur cette fin de récit, en nous laissant donc clairement sur notre faim…