Un biopic-comédie musicale sur la vie de Jerome Kern, ce n’est pas supposé passionner les foules aujourd’hui… Moi-même, je vous avoue avoir eu une curiosité surtout pour voir si un de ses collaborateurs épisodiques (P.G. Wodehouse pour ne pas le nommer) serait représenté à l’écran… Je vous préviens tout de suite que la réponse est non.

Jerome Kern, ce n’est pourtant pas n’importe qui, c’est le pape du Broadway de la grande époque, le type qui commence dans les années dix et qui connaîtra son apogée en 1927 avec Show Boat, comédie musicale atypique qui osera aborder de front aussi bien le racisme des champs de coton que l’alcoolisme du Mississippi et qui deviendra le plus grand succès de Ziegfeld…

Alors, il y avait plein de trucs passionnants à raconter en fait, et on pouvait compter sur Arthur Freed, la MGM et le technicolor pour produire un spectacle de chaque instant, mais le résultat est décevant… Avec une production retardée pour cause de droits tellement longtemps que le bon Jerome cassera sa pipe avant que le projet n’aboutisse, le film a beaucoup perdu de son allant pendant sa réalisation. Sorte de suite plus ou moins habile de numéros musicaux parfois intégrés à l’histoire de Kern, La pluie qui chante souffre d’un rythme désastreux.

Déjà, commencer le film par trente-six numéros successifs de la première de Show Boat, c’est limite hors sujet, surtout que des adaptations existent déjà au cinéma, même si la plus célèbre est postérieure.
Heureusement, après ça s’améliore, Robert Walker n’est pas encore l’inconnu du Nord Express et ça fait bizarre de le voir aussi niaisement gentillet, mais bon, faut ce qu’il faut, l’histoire est approximative, mais l’époque est bien rendue, c’était le temps où il valait mieux rater le Lusitania et où Broadway ne jurait que par les européens, ce qui force ce bon Kern à tâter de la campagne anglaise pour mieux s’imposer à domicile… Enfin, c’est du Cedric Gibbons donc c’est charmant comme tout…

L’histoire est incompréhensible, Walker passe son temps à vivre avec Van Heflin et sa jeune fille comme un vieux couple, à un moment il épouse tout de même quelqu’un mais personne ne semble en tenir compte… Au milieu de tout ça, pas grand-chose d’autre que les chansons elles-mêmes à se mettre sous la dent, on se réveille vaguement pour Judy Garland parce que c’est filmé par Minnelli et que ça se voit un peu, mais sinon, rien de bien palpitant.

Le final est absolument torché dans un pot-pourri massacré par un George Sidney en manque d’inspiration, et on retiendra juste la dernière image d’un Frank Sinatra presque puceau qui reprend Ol’Man River histoire de nous prouver que les compostions de Kern ont encore de beaux jours devant elles…

Par contre, je dormais peut-être, mais à aucun moment je n’ai entendu The Way You Look Tonight, je me suis tapé Angela Lansbury avec des plumes sur une balançoire, Van Johnson qui claquète avec Lucille Bremer comme un vieux beau et Esther Williams sans maillot de bain mais ils ont réussi à me priver aussi bien de Pelham Grenville que de la meilleure chanson, c’est déprimant… Dans le même genre, le Ziegfeld Follies sorti la même année était beaucoup plus présentable…

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le 26 févr. 2013

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Torpenn

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