Pendant une période d'instabilité, Morito, un samouraï défend une jeune dame de cour qui s'est portée volontaire pour se faire passer pour la princesse. Une fois l'ordre rétabli, l'empereur lui demande ce qu'il veut en récompense : il demande la main de la jeune femme, Kesa. Mais celle-ci est déjà mariée : il la plonge dans la honte involontairement, mais s'entête et se laisse de plus en plus aveugler par la passion.
Un tournoi de course de chevaux oppose Morito au mari, Wataru, qui est un homme bon et mesuré. Morito l'emporte ; au banquet, une scène a lieu, car l'entourage les pousse à l'affrontement. Morito va chez la tante de Kesa, la force à faire croire qu'elle est malade pour attirer la jeune femme. Il la menace de tuer toute sa famille si elle ne l'aide pas à assassiner son mari de nuit. Kesa rentre effondrée chez elle. Dans la nuit, Morito tue le corps qu'il voit dans la chambre de Wataru, mais il s'agit de Kesa. Malgré les sentiments qu'elle pouvait avoir pour lui, elle a décidé de se faire tuer à la place de son mari. Wataru refuse de tuer Morito, pour le laisser méditer sa vie durant sur sa folie. Morito coupe sa natte de samouraï et passe la porte de l'enfer.
Drôle de film, qui ressemble sans doute à la caricature que certains se font d'un film japonais. Une esthétique très différente de la nôtre, avec des costumes riches et colorés, dont l'exubérance contraste avec l'austérité absolue des visages et des postures. Les personnages donnent l'impression de s'observer vivre dans des attitudes figées. Les hommes, dans leur immobilité virile. Les femmes, dans des gestes codifiés et très coulés, qui ne trahissent qu'imperceptiblement la passion.
Les couleurs sont très vives, les extérieurs font l'objet de cadrages jolis, quoique pas toujours inspirés (les scènes de bataille du début). Le début est assez déroutant, l'intrigue politique évoquant sûrement des choses au public japonais, tandis que nous, pauvre public français, n'en cernons clairement pas le sous-texte.
C'est donc figé, sans non plus que le réalisateur cherche à sublimer. Mais cet aspect de prime abord fort engoncé ne fait que mieux ressortir la violence des passions, et la construction en crescendo du film est de ce point de vue fort réussie. Un pied qui se pose sur les cordes d'une harpe peut parfois surprendre davantage qu'un coup de poing dans un film de Scorsese.
La porte de l'enfer ne plaira pas à tous les publics. Sans avoir la sublimité des chambaras ultérieurs, qu'ils aient choisi la voie crasseuse ou la voie de l'esthétisation, c'est un film à l'histoire solide, qui offre une reconstitution historique graphiquement fidèle, à défaut d'être évocatrice.
Vu à la Filmothèque du Quartier Latin. Pensée pour les trois spectateurs qui ont quitté la salle quelques minutes avant le dénouement paroxystique. Des fois, on fait les mauvais choix...