La Proie
7.1
La Proie

Film de Robert Siodmak (1948)

"They'll make a Robin Hood out of a cheap hoodlum like that. ...

... The longer he's loose the bigger hero he is."


Canevas légèrement complexe — mais pas autant que celui du très réputé The Killers sorti deux ans avant, pourrait-on rétorquer — pour ce film noir pourtant très classique dans sa forme, réalisé par Robert Siodmak. Un gangster est arrêté et surveillé à l'hôpital à cause de ses blessures, il est accusé du meurtre d'une femme mais lui ne confesse que le meurtre d'un policier en état de légitime défense, un avocat véreux commis d'office essaie de le faire plaider coupable tout en menaçant sa petite amie, un ami d'enfance devenu lieutenant de police se lance à sa poursuite après son évasion faisant suite à son transfert en prison... Les différentes strates du récit s'empilent et s'enchaînent méthodiquement, multipliant de fait les péripéties et les intervenants mais sans jamais entraver l'intelligibilité de l'action, chose assez remarquable et qui est à mettre au crédit des scénaristes et leur travail d'adaptation d'un roman de 1947.


La Proie (aka Cry of the City) n'est pas un modèle de film noir irréprochable mais disons que Siodmak s'applique énormément pour condenser un polar correct de la fin des années 1940. Beaucoup de particularités retiennent l'attention, et la première d'entre elles porte probablement sur le protagoniste pour lequel on éprouve de la sympathie d'entrée de jeu, à savoir un criminel attaché à son lit d'hôpital et malmené par des personnages censés appartenir au camp du bien : on le menace, on menace ses proches, on l'accuse d'un meurtre qu'il nie vigoureusement et en toute sincérité avoir commis... Il y a aussi l'affrontement entre les deux anciens amis d'enfance qui ont grandi dans le même quartier italien de New York, Little Italy, et qui ont suivi des chemins opposés pour devenir malfrat (Richard Conte) et flic (Victor Mature). C'est en outre un film noir qui arbore des atours relativement réalistes pour son époque, avec quelques sursauts de violence surprenants — notamment la mise à mort de l'avocat pourri, interprété à merveille par Berry Kroeger. En revanche on peut s'étonner de voir débarquer la très jeune Debra Paget (14 ans à l'époque) dans le rôle de sa petite amie... Beaucoup moins crédible que l'autre personnage féminin interprété par Shelley Winters.


On regrette aussi le final avec sa condamnation morale imposée par les codes de l'époque (le criminel ayant causé la mort d'un policier va-t-il s'en sortir ? Mystère...) mais cela reste cantonné aux 5 dernières minutes. En contraste, l'analogie établie entre le gentil et le méchant, le flic et le truand, tous deux issus du même milieu et ayant de nombreux points de ressemblance, conserve une pertinence très moderne. Mais c'est l'incroyable Hope Emerson qui vole la vedette à tout le casting dans la dernière partie, l'impressionnante gardienne de Caged (de John Cromwell), ici plus menaçante que jamais lors d'une séquence hallucinante de massage pour le moins incommodant.


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Morrinson

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