La Promesse Verte m’a laissé la désagréable impression d’un film qui arrive avec 15 ans de retard. Non pas que les préoccupations du long métrage – la déforestation, l’huile de palme, la corruption des élites politiques – ne soient plus d’actualité, mais j’ai l’impression que le grand public est maintenant assez bien sensibilité à ces problématiques. Vous me direz, une piqure de rappel, ça ne fait jamais de mal ! Mais le film n’apporte pas grand-chose de neuf sur le sujet.

Second long métrage du réalisateur-documentariste Edouard Bergeon après le succès retentissant d’Au nom de la terre fin 2019 (le film mené par Guillaume Canet avait quasiment atteint la barre des 2 millions d’entrées), La Promesse Verte ancre son récit au cœur de l’Indonésie.

On y retrouve bien sûr les préoccupations du réalisateur, auteur de plusieurs documentaires TV sur le monde agricole, mais transposées hors des frontières de l’Hexagone. Un combat de David contre Goliath, d’une femme et son fils contre les gouvernements corrompus et les multinationales véreuses. Et pourtant, le film est entièrement fictionnel.

La première partie du film est centré autour du personnage de Martin Landreau – joué avec brio par Félix Moati – un étudiant menant une thèse sur la déforestation, qui débute un stage dans une ONG humanitaire locale dans le but de se fondre dans le décor et de s’immerger auprès de la population. Muni de son appareil photo, il est témoin de heurts violents entre les habitants du village et une milice paramilitaire ayant pour rôle d’intimider les locaux.

Le long métrage prend alors des tournures de chasse à l’homme, Martin ayant pris une vidéo compromettante de pressions violentes envers les autochtones. Le garçon est rapidement arrêté alors qu’il tentait de fuir à l’étranger. Accusé à tort de trafic de drogue, il se retrouve malgré lui au cœur d’un procès médiatique et politique qui dépasse largement son cas.

C’est alors, dans une seconde partie, que le film change de point de vue : on quitte Martin Landreau pour suivre le combat de sa mère, prof d’anglais en lycée, pour faire éclater la vérité et libérer son fils.

On sent qu’Alexandra Lamy, qui joue Carole, la mère de Martin, est investi dans son rôle. Sans en faire trop, elle transmet au spectateur ses émotions, ses coups de blues, de déprime et ses regains d’espoirs. J’ai par ailleurs particulièrement apprécié le jeu de Julie Chen, actrice franco-chinoise que l’on a aperçu dans le costume de la princesse Fu Yi dans le récent Astérix et Obélix, l’Empire du Milieu. Elle joue ici Nila Jawad, une militante indonésienne particulièrement investi pour la préservation de l’environnement, et m’a fait fort impression.

Malgré tout, le film est parsemé d’un certain nombre de défauts. La réalisation est correcte mais sans panache, utilisant régulièrement des plans en drone un peu pixelisés. Parler de téléfilm serait un peu excessif, mais c’est tout de même le sentiment que m’a laissé le film en sortant de la salle : un long métrage assez convenu, sans prise de risque et sans surprises. Il faut dire que la bande annonce – encore une fois – dévoile beaucoup trop. Par exemple, Martin Landreau risque initialement 20 ans de prison lors de son procès. Mais la communication autour du film est largement basée sur le fait que le garçon est condamné à mort. Résultat, le twist de la condamnation (qui arrive pourtant relativement tard dans le film) tombe comme un cheveu sur la soupe.

La Promesse Verte est un thriller politique à grosse ficelle, qui reste dans les clous de la facilité sans jamais chercher à surprendre. Il convoque un sujet malheureusement toujours d’actualité et socialement particulièrement important (un carton final, qui a pour une fois la décence de citer sa source, nous rappelle que l’équivalent d’un terrain de foot est déforesté toutes les 5 secondes sur Terre), mais le film aurait sans doute été beaucoup plus impactant s’il avait été confié à d’autres mains.

D-Styx
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le 2 avr. 2024

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