Difficile de ne pas dire que le précieux Reda Kateb fait décemment partie de la liste très fermée des comédiens hexagonaux les plus plaisants à suivre du moment, au même titre que les tout aussi géniaux Pierre Niney et Tahar Rahim.
Et alors que son année 2015 est déjà bien plus bandante que pour la majorité de ses petits camarades (les excellents Loin des Hommes, l'Astragale et Lost River, sans oublier un césar du meilleur acteur dans un second-rôle pour Hippocrate), le voilà de déjà de retour cette semaine dans les salles obscures - et la semaine passée au décidément très riche CEFF 2015 -, avec La Résistance de l'Air.
Ou le premier long métrage du clippeur François Grivois, belle promesse sur le papier, d'un thriller psychologique et froid pour lequel le wannabe cinéaste a également convoqué les habituées du genre, l'inestimable Tcheky Karyo et la jolie Ludivine Sagnier.
La Résistance de l'Air donc, ou l'histoire de Vincent, un trentenaire dans la force de l'âge, qui est champion de tir au fusil à 300 mètres.
Il mène une vie tranquille avec sa femme et sa fille, jusqu'au jour ou des problèmes d'argent l'obligent à remettre en cause ses projets et menacent l'équilibre de sa famille et de son couple.
Une rencontre au stand de tir avec Renaud, personnage aussi séduisant qu'énigmatique, lui promet une issue grâce à un contrat un peu particulier.
Dès lors, Vincent met le doigt dans un engrenage des plus dangereux...
Assistant réalisateur sur le merveilleux Un Prophète, il est évident que nos attentes de cinéphiles plaçaient Fred Grivois directement en potentiel héritier de Jacques Audiard, et encore plus avec une péloche au pitch aussi intriguant qu'accrocheur.
Le hic, c'est que dans le mélange plus ou moins adroit entre le polar sec et le drame social - jamais réellement approfondi - qu'incarne ce premier passage derrière la caméra, Grivois ne transcende que trop rarement son épatante exposition et toutes les belles promesses qui caractérisait le projet sur le papier.
Si cette descente aux enfers d'un couple bancal s'avère réaliste avec ambiance aussi tendu que froide, l'histoire elle se perd pourtant dans un traitement des plus prévisible, un scénario palot accumulant les incohérences (la culpabilité du héros venant d'ailleurs beaucoup trop tard) et les poncifs (en même temps, ce sont des tics un peu inhérents à tout premier long), malgré quelques bonnes idées notables.
Efficace à défaut d'être réellement captivant, rythmé même si cruellement dénué d'action et conclut sur un climax trop facile pour convaincre, La Résistance de l'Air ne vise finalement juste que d'un point de vue technique, la mise en scène de Grivois - solide et appliquée -, le plaçant décemment au-dessus du lot des yes men balancés sur le devant de la scène du genre par tonton Besson et Europa Corp.
Devant la caméra, Ludivine Sagnier fait le boulot tout autant que le grand - et définitivement trop rare - Tchéky Karyo, tandis que Reda Kateb impressionne une nouvelle fois dans la peau du père de famille financièrement à la dèche, tiraillé par un contrat moralement discutable mais salement rémunérateur.
Sobre, subtil et charismatique à souhait, l'acteur est indécent de naturel et tire vers le haut un thriller convenable, grisâtre et divertissant mais que l'on aurait espérer meilleur.
Jonathan Chevrier
http://fuckingcinephiles.blogspot.fr/2015/06/critique-la-resistance-de-lair.html