Quand Hong me met à nouveau Sang dessus de Soo...

Avis aux membres de la secte HSS : le 15 février 2023 pourrait bien être un jour à marquer d'une pierre blanche pour vous, en effet notre grand gourou est totalement de retour avec cette "Romancière".

J'explique mon point de vue, mais n'hésitez pas à me contredire si vous ne partagez pas cet avis : on peut considérer que le virage effectué par Hong Sang-soo se situe au niveau de "La Caméra de Claire", première de ce que j'appellerais ses vignettes, de petits films au format souvent très court et au processus de fabrication ultra-léger et rapide. Qu'on aime ou non le monsieur, depuis lors pas facile de le suivre, les films, de surcroît pas forcément très faciles à débusquer, s'enchainant à vitesse grand V et proposant des structures si ténues qu'elles ne parlent souvent qu'à ses adeptes les plus fervents qui y trouvent toujours ses thèmes de prédilection et son style inimitable, mais aussi un moyen de suivre ses "humeurs", ces pastilles étant pour nombre d'entre elles très autobiographiques.

Adeptes dont je fais partie, pour le meilleur et pour le pire, pire que je n'avais jamais connu avant le 7 juin dernier et la découverte de "Juste sous vos yeux" qui pointera le bout de son nez dans les salles françaises le 21 septembre. Attention entre HSS, même quand il se montre un peu radin, et moi le pire est à relativiser car je me sens toujours bien chez lui, un peu comme en famille. Donc là, entendons-nous bien, j'y ai pris ma dose de plaisir, mais le shoot était loin de provoquer les palpitations habituelles et je me suis senti pour la première fois un peu en retrait, comme légèrement indifférent à l'histoire minuscule qui se déroulait juste sous mes yeux. Un plan final magnifique, venant me rappeler à quel point le bonhomme est un grand metteur en scène, sauvait en partie l'affaire mais je ne pouvais cacher une certaine déception, ou devrais-je dire frustration, à la sortie de la projection.

Alors forcément au moment de repartir à l'abordage à peine deux semaines plus tard une petite appréhension m'étreignait, car comment aurais-je pris un deuxième rendez-vous manqué consécutif ? Je ne le saurai jamais, et tant mieux, car "La Romancière" est une grande petite Hong Sang-Soorie. Tout y est : les hasards des rencontres, les livres, les fameuses boucles, la déclaration d'amour au cinéma avec forcément la présence d'un réalisateur, les tables qui permettent de zoomer/dézoomer, de passer nerveusement d'un personnage à l'autre, l'humour et bien entendu l'alcool. Preuve qu'il est réellement de retour, tout ce petit monde a envie de boire et se retrouve pour une belle grosse minasse au makgeolli. Et l'emballage ? Retour ici au noir et blanc (sauf pour quelques instant de grâce que je vous laisserai découvrir), et quel noir et blanc ! Rien à voir avec celui des très beaux "Grass", "Hotel by the River", "Introduction" ou encore ce que je considère comme son monument, "Le Jour d'après", mais le rendu est aussi beau que déstabilisant, la texture permettant un travail photographique assez dément.

Et enfin il y a l'une des raisons essentielles de cette grande réussite : je veux bien entendu parler de Kim Min-hee, qu'il n'avait plus filmée ainsi depuis trop longtemps. Plus les minutes passent plus la caméra l'enveloppe, se rapproche de son visage, la désire, jusqu'à une scène finale totalement bouleversante, une véritable déclaration du pygmalion à sa muse.

Est-ce donc parce que je n'avais pas vu HSS aussi amoureux depuis longtemps que cette œuvre m'a autant touché ? Peut-être.

Mettrais-je cette "Romancière", grand film sur l'admiration et le charisme, et qui a par ailleurs remporté le Grand prix du jury au dernier festival de Berlin, tout en haut des miniatures de mon Sud-coréen préféré ? Certainement.

Hâte, très hâte au 15 février pour savoir si ce sera également votre cas...