C'est après avoir lu la critique de ce film par un de mes éclaireurs (Watchsky pour ne pas le nommer) qui m'avait fort intrigué, que j'ai acheté le DVD ...
J'étais intrigué car contrairement à ce que les gens pensent, Lautner n'est pas du tout un metteur en scène monolithique qui n'aurait excellé que dans les "tontons flingueurs". Il a aussi réalisé d'excellents films très différents, policiers comme "le 7ème juré", d'autres sur la guerre de 14/18 comme "la maison assassinée" tiré d'un roman de Pierre Magnan et surtout, pour nous rapprocher de "la route de Salina", les délicieux "Fleur d'oseille" et "Quelques messieurs trop tranquilles" qui font intervenir des personnages genre hippie. Il y a vers cette même période "le Pacha" où Gabin côtoie Gainsbourg. Bref, Lautner explorait dans les années 70 d'autres domaines intéressants.
J'étais donc intrigué avant le visionnage. En fait après avoir vu le film, je me suis rendu que je n'étais pas seulement intrigué mais complètement envouté.
Déjà, le lieu de tournage désertique et volcanique (sable et pierres noires sans végétation) qui ne ressemble à rien et me paraissait difficile à rattacher au Mexique ou au sud des Etats-Unis. J'avais beau scruter les plaques d'immatriculation des voitures qui ressemblaient aux plaques US mais restaient toutes illisibles sauf une clairement mexicaine. En fait, c'est ni l'un ni l'autre, vérification faite, le film a été tourné dans une île Canarie, en Espagne...
Et puis l'histoire ! Un jeune hippie, Jonas, qui fait la route et s'arrête dans une station service isolée où il rencontre une femme, Mara, qui croit reconnaître son fils parti en claquant la porte quatre ans plutôt. Le truc surréaliste ! Comment une mère peut-elle prendre un inconnu pour son fils absent depuis seulement quatre ans ? Et puis, le mystère s'épaissit doucement car voilà que la fille de Mara reconnait spontanément le jeune hippie comme son frère et puis, ça suffit ... J'arrête là de raconter le film.
Le film démarre comme un (à peu près) classique road movie et se poursuit en un huis-clos à trois personnes.
Donc, me voilà à la fois intrigué par cette mystérieuse histoire et envoûté !
Envoûté par pleins de trucs ! le paysage lunaire, bien sûr mais aussi le retour (factice !) de la joie de vivre et du bonheur chez ces deux femmes, manifestement dans le déni, la musique signée par Christophe.
Autre élément de trouble, le casting (des personnages principaux) est américain.
D'abord Mimsy Farmer joue le rôle de la fille de Mara (et donc la sœur du jeune hippie) ; Mimsy Farmer dans les paysages volcanique et lunaire m'ont immédiatement fait penser à "More" de Barbet Shroeder. A la fois éclatante de beauté et terriblement humble et fragile.
Ensuite, la mère Mara qui est jouée par une Rita Hayworth méconnaissable (Gilda c'était il y a 25 ans ...). Elle joue le rôle d'une femme, au fond, terrifiée par la solitude qu'elle voit venir. Elle s'accroche au mensonge. Quand elle apparait un instant, au début du film, hurlante sous la pluie, j'ai même cru que c'était Mimsy Farmer. La mise en scène de Lautner est quand même tout-à-fait excellente car je suis resté avec cette idée jusqu'à la fin du film…
Le troisième personnage c'est Jonas, le hippie qui est interprété par Robert Walker Jr. Son personnage est celui de l'homme qui profite de la bonne opportunité de la place offerte du fils prodigue enfin revenu, de la mentalité du hippie "carpe diem" jusqu'au moment où le jeu va trop loin et où la bonne pioche se révèle être plutôt un cauchemar ...
Je ne connaissais pas du tout ce film qui ouvre la filmographie de Lautner sur des horizons intéressants. C'est un film onirique, envoûtant où il s'avère illusoire de vouloir revenir en arrière dans le passé.
J'ai vraiment aimé.