Sorti en 1987, La rue montre montre bien la fourberie de la Cannon, firme productrice.
La compagnie gagne les droits pour faire un éventuel Superman IV, mais se cogne au refus de Christopher Reeve de reprendre le rôle. Pas bête, ce dernier va leur donner un script d'un film qu'il rêve de jouer depuis des années en échange d'un quatrième opus de l'homme de fer.
Et donc, voici la Cannon qui produit un film qu'il ne voulait pas au départ, mais juste en échange d'un plus morceau. Il faut dire que c'est un petit budget, mais aux signatures attrayantes ; Christopher Reeve dans un rôle sérieux, Jerry Schatzberg qui est habitué à filmer dans la rue, et une grande découverte nommée Morgan Freeman...
Le film raconte l'histoire d'un mensonge ; celui d'un journaliste qui, pour être dans les papiers de son patron, va écrire un article sulfureux sur un monde qui lui est inconnu, celui de la prostitution. Cependant, échaudé par les quelques rencontres, et un mac qui s'en prend à sa copine, il va totalement inventer ses sources, et donc bidonner son article. Contre toute attente, son papier va avoir un grand retentissement, et ce n'est pas sans conséquences sur lui, son entourage, et le milieu qu'il était censé côtoyer...
On voit bien dans ce sujet la passion sincère de Schatzberg, et de dénoncer le scoop facile, le buzz comme on dirait aujourd'hui, à partir de rien. Mais c'est porté par des acteurs tous épatants, comme Christopher Reeve, qu'on perçoit comme fragile, et un formidable Morgan Freeman, qui joue le souteneur, et dont c'est le rôle qui le fera connaitre aux yeux du public, bien avant Miss Daisy et son chauffeur.
Freeman est vraiment l'intérêt du film, et il est fascinant de le voir au départ comme un gars limite sympa, mais dont ses accès de colères sont marquantes. Au début, on va le voir au pied d'un appartement où se trouve une prostituée avec un client. Alerté par les cris de la femme, il va se mettre à battre à mort le client, sur le prétexte qu'il abîme ma marchandise.
On est très loin de ses rôles futurs, et il montre ici un jeu plus complexe qu'il n'y parait ; à la fois un gardien, pour ses prostituées, et un démon en apparence, car il n'hésite pas à s'en prendre à elles si celles-ci lui manquent de respect.
La rue repose sur ce mensonge éhonté du journaliste qui va être monté en épingle jusqu'à un tournant plus tragique, qui sonne comme un cri de la vérité. Alors certes, il y a quelques facilités, comme le chef de Christopher Reeve qui est caricatural, ou alors l'accession ultra-rapide de ce dernier à la célébrité, sans oublier Kathu Baker qui en fait un peu trop...
Mais il faut souligner la grande qualité d'interprétation générale, et qui plus est dans un New York qui est en fait ... Toronto ! Enième roublardise de la Cannon...