Ce film, on me l'a filé il y a quelques années. Un colocataire. C'était son cadeau d'adieu.
Je ne savais rien de ce film, mais au vu du titre, je m'attendais à une critique acerbe du cinéma hollywoodien. Il faut savoir que j'aime le cinéma de divertissement. En fait, je considère tout film comme une source de divertissement, peu importe qu'il soit lourdement porté par des théories ou des concepts. Le but de la vie est de s'amuser. Et on peut s'amuser dans tout. Il n'y a donc pas de honte, à mon sens, de passer d'un Scary Movie 9 à un Terrence Malick ; les deux films se valent.
Toujours est-il que je ne savais pas grand chose du film, mais étais curieux de le découvrir. J'étais au courant tout de même de l'aspect fort théorique du film, un peu difficile d'accès en un sens, puisque très (trop?) bavard. D'ailleurs ça fait plusieurs soirs que j'hésite à le mettre, mais c'est seulement en ce jour du 21 mai 2013 que j'ai trouvé la force (les autres soirs j'étais un peu trop fatigué et en quête d'un autre type de divertissement).
Le film est cool. Durant la première moitié, Guy nous parle de la société du spectacle tel que mon à priori m'a laissé l'envisager, c'est-à-dire au travers du spectacle de la télévision, de la radio, etc... Cette partie, bien qu'un peu redondante est très intéressante. Et la qualité majeure est que Guy ne juge pas, il se contente de décortiquer un mécanisme auquel nous sommes libres ou non (plutôt non) d'adhérer. En tous cas, je ne me suis jamais senti agressé bien que je constate que le texte soit destiné à un spectateur de mon genre (entendez par là, un mec qui a bien reluqué toutes les nanas présentées). Les images utilisées pour appuyer sa thèse sont justes, bien trouvées, et démontrent que le théoricien sait faire preuve de beaucoup d'humour.
Après la deuxième partie est plus sérieuse. Enfin il reste des images très amusantes, mais le propose de montre un brin plus grave en transposant ou plutôt en détournant ce qui a été dit du spectacle télévisuel au niveau d ela scène politique de tous les jours. C'est assez percutant. C'est aussi la partie la plus compliquée à saisir. La moins rythmée aussi puisque les dernières images auraient pu nous être épargnées. Alors que jusque là Guy avait instauré une bonne dynamique de montage en faisant silence, périodiquement, quelques minutes, le temps pour le spectateur de s'aérer les neurones devant quelques extraits sympathiques.
N'empêche que ça fonctionne, et tout ce qui a été dit au sujet des stars et produits de consommation revient alors en tête dans un autre contexte. D'une certaine façon, Guy nous force à détourner son propos, de nous le réapproprier, d'en faire une nouvelle vérité. Et là il juge. Ce qui était insignifiant au niveau de l'entertainment ne l'est plus au niveau des décisions politiques. Peut-être cela manque-t-il de distance par moment, mais ça reste efficace.
Le point fort du film est donc de traiter de détournement et d'être en soi un détournement d'images conscient de sa nature factice. C'est assez bizarre. Mais si l'on prend La classe américaine, il s'agit là d'un détournement qui s'ignore, c'est-à-dire des segments de films mis bout à bout pour raconter une nouvelle histoire. Ici, Guy ne fait jamais que raconter le processus de détournement et de l'appliquer tout en prenant soin de rappeler que c'est un exercice. Impossible donc de se laisser totalement happer par le projet, puisqu'il empêche son spectateur d'entrer et de se laisser duper. Il faut réfléchir. Cela n'empêche pas de grignoter comme je le fais souvent devant un film.
Cela signifie-t-il que l'illusion du cinéma est bannie? Non plus. Mine de rien, si l'on réfléchit sur la forme, c'est tout de même le discours qui nous embarque. Finalement c'est un film très proche de la nouvelle vague, mouvement qui se plaisait à rappeler au spectateur que le film n'est jamais qu'un assemblage d'images tout en l'hypnotisant.
Bref, La société du spectacle est un film théorique fort sympathique, fort intéressant et dont le support reste pertinent ; en effet, lorsqu'il s'agit de déblatérer des théories, il vaut toujours mieux opter pour le livre, cela permet de mieux expliciter sans perdre de temps (en 20 pages on raconte bien plus qu'en 20 minutes) ; pourtant le film apporte quelque chose au discours, le fond renforce la forme. Et ça c'est vraiment chic !