1945, la défaite est proche. Souffrant d'une pneumonie, Shûsaku Kawamoto suit les conseils d'une femme rencontrée par hasard, et se rend dans un onsen niché dans les montagnes. A l'hôtel d'Akitsu, il rencontre Shinko, une jeune fille vive et joyeuse. Alors que les médecins abandonnent Shûsaku à son sort, Shinko décide de veiller sur lui...
La Source thermale d'Akitsu apparaît comme un changement radical dans l'œuvre de Yoshida, en tout cas d'un point de vue formel et narratif. C'est un ample mélodrame se déroulant sur plusieurs années, en couleur, dans la campagne japonaise. Il s'éloigne des paysages industriels et urbains, de son noir et blanc stylisé et de ses drames sociaux.
Le fond lui est par contre assez similaire, dans la manière de créer des situations intimes qui seraient le reflet ou la résultante du contexte dans lequel évoluent les personnages.
Akitsu, lieu paradisiaque perdu dans les montagnes est un havre de paix déconnecté de tout. Sorte de bulle à l'écart du monde, de la guerre et de la reconstruction du Japon. Rien ne bouge, tout y est figé, intemporel. Outre un refuge permettant de fuir les ravages de la guerre, il constitue une sorte de berceau de renaissance pour les japonais, revenir au contact des éléments de la nature, des traditions, du passé nippon.
Le film se situe donc à la fin de la guerre de 45, le Japon a capitulé et se diffuse un parfum de déception, honte, amertume mais également de soulagement d'en avoir fini avec ça.
A l'annonce de cette défaite, Shinko s'effondre en larmes, larmes qui concentrent à peu près toutes ces émotions diverses. Mais cette scène pivot matérialise un double mouvement, celui de l'éloignement de l'horreur et celui de la naissance d'un amour, rapprochement de Shusaku qui la prend dans ses bras. Shinko évacue tout ce passé dans un torrent de larmes, libère son corps, son esprit, et laisse toute la place afin d'accueillir ce nouveau sentiment.
Le film, très elliptique, raconte une passion amoureuse tragique et impossible qui s'étend sur 17 ans entre Shinko qui reste à Akitsu avec son amour indéfectible pour Shusaku et ce dernier qui part et fonde une famille à Tokyo. Il revient uniquement 5 ou 6 fois la voir et le film ne raconte que ces passages de retrouvailles et nouveaux départs. Comme si rien n'existait entre ces moments, ou rien qui ne valle la peine d'être conté. Ces passages, de plus en plus intenses et bouleversants, sont rythmés par la tonalité des saisons, magnifiquement rendues par la belle photographie du film.
La scène des larmes de Shinko est un point de rupture. Comme si quelque chose s'était bloqué à ce moment là. Comme si le parfum de mort émané par la guerre s'était répandu dans le cadre et envelopperait les personnages. La mort hantant dès lors chaque plan et rendant impossible toute relation. La seule entente envisageable serait dans cette finalité. Mourir avec son amant est le rêve de Shinko.
Dans cette relation tumultueuse entre cette femme, éternellement belle, éternellement jeune (la source thermale dans laquelle elle se baigne la rendant immortelle) et cet homme qui part, marqué par le temps, les transformations et la vie, Yoshida symbolise l'union impossible de deux images du Japon au lendemain de la guerre. Celui du passé, des cultures et des traditions, et celui du bouleversement économique et de la reconstruction (comme il est question dans ses premiers films).
L'un voyant le nouveau Japon s'éloigner, l'autre lui tourner le dos et l'ignorer.
Le regard de Yoshida apparaît alors terriblement noir sur l'avenir de son pays, la beauté et la droiture de l'un voué à sa perte face à une certaine perte d'humanité et de lâcheté de l'autre.
La Source thermale d'Akitsu est donc beaucoup de choses à la fois, merveilleux portrait de femme, mélodrame tragique Sirkien bouleversant et constat noir sur le Japon.
Non exempt de défauts toutefois, notamment une musique omniprésente qui tend vers l'emphase.
Mais c'est un très beau film.
Teklow13
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le 13 févr. 2012

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Teklow13

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