Je n'aime pas tous les films de Federico Fellini, mais certains me touchent plus que d'autres, et en revoyant récemment La Strada, je m'aperçois que c'est celui qui me parle le plus. C'est avant tout un film bouleversant qui permit à Fellini d'être connu internationalement, un peu grâce à la présence d'Anthony Quinn, mais aussi par son traitement qui se rattache au néoréalisme italien parce qu'il montre des humbles et des marginaux, et par son sujet social, tout en se démarquant légèrement. Le film décrit une individualité forte, un monde exubérant, un univers baroque, il va vers une fatalité inexorable tout en évitant le misérabilisme.
Fellini pousse très loin l'opposition de ses deux personnages principaux, l'un est Zampano, un forain brutal et rustre, qui cache ses sentiments, et qui rudoie Gelsomina, pauvre fille vendue par sa mère pour pouvoir manger ; Anthony Quinn livre un jeu puissant et rude comme il en montrera encore à Hollywood ou ailleurs (je pense notamment à Zorba le Grec). Sa partenaire Gelsomina incarnée par Giuletta Massina, épouse et muse de Fellini, est une sorte de clown triste, le film est submergé par l'expression poétique, et son apport est capital car elle apporte une dose d'émotion très forte, son regard mélancolique et les expressions de son visage lui donnent un aspect lunaire, mais d'un autre côté, sa faiblesse et son côté pleurnichard m' ont par moments agacé.
Au sein de ce duo atypique, surgit "il matto", le funambule fou incarné aussi par un excellent Richard Basehart, qui dérègle encore plus les rapports entre Zampano et Gelsomina, et dont l'expression poétique prend tout son sens. Je regrette néanmoins une fin un peu soudaine et trop abrupte, mais dans l'ensemble, le film qui a été considéré comme un chef d'oeuvre, est souvent bouleversant, peut-être trop même, c'est une belle histoire humaine et touchante.