C'est peut-être un peu lourd comme titre de critique, mais au moment où j'écris, je ne peux que penser aux derniers chef-d'oeuvre respectifs de Xavier Dolan et Abdelatif Kechiche.
Tout d'abord de par les thèmes qu'il traite, comme les problèmes judiciaires ou la force de l'amour dans tous les combats. Alors que Malony, 16 ans, est délinquant "depuis qu'il marche" selon les dires de son irresponsable de mère (Sara Forestier), ses rencontres au fil du film sauveront du moins le jeune homme, de par les mains qu'on lui tend et l'amour qu'on lui offre.
En plus de cela, le personnage principal fait furieusement penser à Steeve de Mommy. Ultra-violent dans beaucoup de scènes, il ne donne que très peu de répit à son entourage, la juge, son éducateur,... A la différence près que le personnage d'Antoine-Olivier Pilon aime dès les premières minutes de Mommy. Sa mère est d'ailleurs quasiment sa seule raison de vivre. Or, Malony n'aime personne. C'est d'ailleurs ce ressort scénaristique qui servira de tremplin à son évolution, qui heureusement d'ailleurs, sauve à point nommé un personnage que je trouvais pourtant irritant et avec lequel je n'arrivais à créer aucune empathie au début. Pour en revenir à Rod Paradot, je suis encore impressionné. Ce mec n'a jamais joué dans rien, sort d'un CAP menuiserie, et livre une prestation assez dingue.
C'est là aussi le point commun que je trouve avec Dolan et Kechiche, c'est que les acteurs sont impliqués à 300%. Que ce soit Rod Paradot, ou bien même Catherine Deneuve (qui n'a plus besoin de montrer qu'elle est une des meilleures actrices du cinéma français), ou Benoît Magimel, dont je trouve tout de même regrettable sa présence si rare au cinéma. A chaque fois que je le vois, il est incroyablement juste. J'ai juste une réserve sur Sara Forestier, mais je dois avoir un problème avec elle. Je sais pas, je la trouve trop caricaturale.
Ajoutée à ces excellentes performances, la mise en scène d'Emmanuelle Bercot se base sur une caméra à l'épaule en constant mouvement, qui me rappelle forcément les plus grandes heures du cinéma de Kechiche. De plus, elle a opté pour un cadrage souvent très rapproché, enfermant les visages et captant au plus près l'émotion. Ainsi, on atteint parfois des scènes mémorables lorsque ce dispositif épouse l'éruption dynamique et violente de Malony. Après coup, j'ai pensé à l'influence possible de l'amie de Bercot, Maïwenn, dont la volonté évidente de réalisme a pu donner quelques idées.
Hormis ses qualités cinématographiques, il est temps de rendre à La Tête Haute les remerciements qu'il faut lui accorder, concernant son hommage aux éducateurs notamment, et à toutes ses personnes qui essaient de sauver l'insauvable. Je ne suis pas particulièrement touché par ce milieu, mais il faut avouer qu'il peut être parfois, à tort, trop souvent dénigré, à l'instar de la justice par exemple. Ainsi, le choix de Thierry Frémaux de placer ce film en ouverture du dernier Festival de Cannes est honorable. Après Gatsby et Grace de Monaco, un film social pareil donnait un vent de fraîcheur nouveau après deux métrages "champagne et paillettes". Et puis en plus, c'est un bien meilleur film.