Huis clos vertigineux et intellectuellement stimulant entre un auteur adaptateur de la pièce éponyme (Mathieu Amalric en double, y compris jusqu’au mimétisme physique, de Roman Polanski) et une comédienne venue passer une audition avec retard un soir d’orage (Emmanuelle Seigner, qui peine à trouver le ton juste), La Vénus à la fourrure est, une fois encore, une transposition d’une pièce de théâtre pour le grand écran, après le décevant Carnage en 2011. Mille-feuilles sadomasochiste qui superpose les niveaux de lecture, les rapports de domination et l’enfance dont les traumatismes construisent l’adulte, l’imbrication démesurée entre répétitions et explications de texte, entre le vécu et l’investissement jusqu’à une inversion des rôles qui plonge définitivement le spectateur dans le trouble et la jubilation. On participe ainsi à une brillante réflexion sur le métier d’auteur et la place du comédien qui finit par déborder le cadre du spectacle vivant pour aborder les thèmes du féminisme dans un jeu pervers et sans cesse refaçonné du chat et de la souris (ou encore de la chatte et du souriceau).
Limité à un seul décor (la salle et la scène) et aux trouvailles sonores (le bruit des accessoires invisibles comme une tasse de café ou des feuilles d’un contrat), La Vénus à la fourrure tient avant tout du théâtre filmé et sollicite davantage les oreilles que les yeux. En restant dans l’abstraction et le symbolisme, le film semble également se réduire à un exercice de style cérébral, pétillant et follement intelligent. L’émotion est d’abord du registre de l’intellect flatté que le réalisateur du Bal des vampires nous tienne en si haute estime en partageant ce qu’on peut raisonnablement penser comme sa vision de la création et de l’art dans un long-métrage exigeant et personnel qui pourra décontenancer, sinon rebuter, certains.