Film prometteur: tiré d'une histoire de Georges Simenon, emmené par un duo d 'acteurs parmi les plus remarquables du cinéma français, Danielle Darrieux et Jean Gabin, mais un réalisateur Henri Decoin qui ne parvient pas à sublimer tous ces ingrédients malgré des efforts bien visibles ( trop ).
Bref rien de bien méchant alors qu' un formidable drame cruel, la dissection d'un couple et son ratage nous tendaient les bras...
Les dialogues sont parfois excellents ou du moins dotés de répliques bien senties comme celle-ci," le désir est le plus court chemin entre deux êtres", tirée (je le suppose) du roman de Simenon qui détenait à l'instar de Flaubert les secrets de l' âme féminine.
Certaines scènes sont assez bien orchestrées et filmées mais la construction en flash back ( ce film illustre combien cet exercice est délicat ) ne permet pas une montée en puissance vers la vérité et l' émotion, elle embrouille plus qu'autre chose. Le suspens est assez bien tenu a contrario, sans que le cœur du film en soit pour autant magnifié.
Le cynisme de Simenon ( voir le rôle joué par la marieuse, et certaines répliques de Gabin) se trouve retranscrit, mais on peut regretter que Decoin ne soit pas parvenu à le déployer pleinement, à lui donner un sens, une signification. Il est plus à l'aise à peindre le milieu bourgeois, l'entre soi qui y règne avec ses silences et ses jalousies ( beaux seconds rôles du médecin et du magistrat) alors que le sujet annoncé par le titre reste effleuré.
De couple il n y a pas eu. Bébé demeure pour nous jusqu'au bout une énigme, une étrangère à nos yeux comme si nous étions ce François Donge dont les remords apparaissent dès lors un peu forcés. ( le coup du sublimé dans le café c'est un peu fort vous ne trouvez pas ? ), le film ne décolle pas de la tendance mélodrame bourgeois.
Ajoutez à cela mon Jean pas au mieux de sa forme ( je le soupçonne de ne pas avoir vraiment apprécié le type dont il avait endossé le rôle).
Bref, Henri Decoin rate son film comme François et Bébé ont raté leur couple. Une cohérence appréciable pour une mince consolation.
Si parmi les films tombés dans l' oubli se dissimulent des diamants ou des pièces de choix, ce film se situe juste un peu dessous, il surnage sans mériter de disparaître. A voir quand aucune pépite n'est à l'horizon et que le bon vieux cinéma français, de qualité m'sieurs dames, vous démange...
Pour ceux qui aiment les anecdotes amusantes ou insignifiantes, ou un peu de sel dans leur soupe, Darrieux était l' ex d' Henri Decoin au moment où ils tournèrent le film...De là à dire qu' elle resta un mystère pour lui, une perle qu'il ne sut faire briller, serait perfidie gratuite de ma part ...