La victime est un film noir anglais qui traite en fond de l'homosexualité, celle d'un mari rattrapé par son passé. C'est un thème très courageux dans l'Angleterre des années 1960, où s'afficher publiquement entre hommes ou entre femmes était passible d'emprisonnement jusqu'en 1967.
Dirk Bogarde joue cet homme, un avocat qui pourrait devenir juge, jusqu'à ce qu'il apprenne que son ancien amant lui demande de l'aide après qu'il ait volé beaucoup d'argent à son ancien travail. Mais cet avocat, de peur que soit révélé sa nature, et pour la suite de sa carrière, ne veut pas le protéger, jusqu'à un évènement tragique.
Bien que le nom homosexual ne soit prononcé qu'une seule fois, ce qui fut une première pour un film anglais, toute l'histoire est à l'image de cette prise de risque, à savoir qu'il faut se méfier de tout le monde, de son ombre, pour un résultat très convaincant. Il faut saluer à ce titre l'interprétation de Dirk Bogarde qui, dans la vie, était homosexuel, constituant de ce fait un troublant miroir avec son personnage d'avocat ayant mené une double vie, bien que son épouse, jouée par Sylvia Syms, était au courant. On sent ce climat délétère, à l'image de cette porte de garage où le personnage de Bogarde est surnommé Farr ou encore son épouse qui est questionnée sur ses rapports avec son mari.
Non seulement le film est de qualité, mais il est en soi courageux ; autant de bonnes raisons que de l'aimer, en plus d'une réalisation technique très soignée.