Une bonne pub sur la cigarette, un très mauvais film sur l'amour

La liste des défauts de La Vie d'Adèle est longue. Ça commence par une Léa Seydoux qui joue aussi bien qu'un poulpe asphyxié, ce qui se remarque d'autant plus qu'Adèle Exarchopoulos joue particulièrement bien. Ça continue par une caricature des milieux sociaux vulgaire et pleine d'a priori puants où les pauvres mangent des pâtes bolo en faisant des bruits de succion et en affirmant qu'il faut avoir un vrai métier (comprendre, avec un salaire fixe tous les mois) tandis que les riches savourent des huîtres tout en dialoguant sur les finesses du vin et de l'art. Ça se poursuit par des scènes de sexe (lesbien mais pas que) qui permettront aux fans de porno de faire afficher une Palme d'Or dans leur collection, profitez-en, c'est pas tous les jours. Si les scènes de sexe longues et voyeuristes ne leur ont pas suffit, les amateurs de porno peuvent toujours admirer les gros plans sur les fesses des statues lors de la scène du musée. Délicatesse, quand tu nous tiens !

Ça s'enchaîne par des discussions impromptues, totalement inutiles et sans aucun rapport avec le reste notamment sur l'orgasme féminin "mystique" ou l'existentialisme (y'a t-il une seule personne qui ait discuté de Sartre lors de son premier rencard à 17 ans ?!). Ça passe par des scènes de cours au lycée qui sont aussi ennuyantes que l'étaient les miens (au moins quelque chose de réaliste dans ce film). Ça ajoute des sauts dans le temps qu'on met dix minutes à apercevoir. Ça fait des gros plans tremblotants sur le visage d'Adèle qui passe son temps à se recoiffer pour vous dévoiler toute sa subtilité et ses doutes mais qui m'ont juste filé le tournis et l'envie de lui acheter une pince à cheveux ou une tondeuse. Et ça se finit aussi mal que ça a commencé.

Mais ce qui m'a le plus perturbé, ce n'est pas tant tous les poncifs et l'extrême mauvais goût du film. Des films pourris, j'en ai vu quelques uns mais, là, en plus de relever les valeurs à l'opposé des miennes et les jugements à l'emporte pièce, je me suis posée une question. Elle était où la personne qui était censée vérifier la continuité du film et le fait qu'il ne présente pas d'anachronismes ? Ils avaient oublié de l'embaucher ou elle avait tellement honte de ce qu'elle voyait qu'elle s'était pendue au bout de deux jours ?
La scène où Adèle et Emma se revoient dans un restau et qu'elles en viennent presque à faire du sexe là au milieu, y'a vraiment personne qui s'est dit qu'un serveur ou un client aurait dû intervenir ? Ça vous arrive souvent, vous, d'aller manger une pizza et de vous retrouver à mater deux personnes en train de se masturber mutuellement ? Et si oui, vous avez tourné la tête pour manger votre Royale ou vous êtes allé leur filer l'adresse de l'hôtel le plus proche ?
À part ça, le film ne se situe pas explicitement à une certaine date. Cependant, Adèle danse lors de l'anniversaire de ses 18 ans sur la chanson "I follow rivers" de Lykke Lee, sortie en 2011. Adèle était donc au lycée en 2010/11 grand maximum. Y'a pas une seule personne sur tout le tournage qui s'est dit qu'elle devait sûrement avoir un téléphone portable, comme 99% des lycéens et que c'était par conséquent totalement stupide de faire appeler Emma sur le téléphone fixe d'Adèle ?! Bon, alors, d'accord, quand le réalisateur a une tellement bonne connaissance des classes moyennes qu'il les fait manger comme des sagouins et débiter des généralités comme "tu peux être artiste si ton mari t'entretient", on peut se dire qu'il les pense en retard de vingt ans sur les moyens de communication également. Soit, j'ai du mal à y croire mais je veux bien essayer. Mais qui pourrait m'expliquer comment Adèle peut fumer dans l'enceinte du lycée alors que c'est interdit depuis 2007 ?! Non mais vraiment, personne n'y a pensé ? C'était trop dur de la filmer la clope au bec dans la rue plutôt que sur les marches de sa salle de cours ?!

D'ailleurs, combien d'argent a reçu l'équipe du film par l'industrie du tabac ? Non parce que moi, j'ai eu l'impression de voir une publicité de trois heures sur le tabac plutôt qu'un film sur une histoire d'amour. Ça apporte quoi à l'histoire et aux personnages qu'ils fument ? C'est censé donner un côté mystérieux ? Non parce que, jusqu'à preuve du contraire, le tabac, ça rend les dents jaunes et les poumons encrassés mais pas les personnages plus profonds. Pour cela, un seul miracle, un bon scénario. Mais, a priori, le scénariste s'est pendu en même temps que le scripte ...