Voir le haut de la page des critiques entièrement squattée par des avis fake de comptes créés pour l’occasion (merci la prod’ ? la distrib’ ?) me donne l’envie de m’attarder sur ce film.
La vie de ma mère est le premier long métrage de Julien Carpentier, après plusieurs courts métrages.
Le film, construit comme un « road movie psychiatrique » raconte l’histoire de Pierre, un jeune fleuriste à son compte qui enchaîne les journées à rallonge pour garder la tête hors de l’eau. Sa vie est peut-être sur le point de basculer car on le trouve, au début du film, en bonne voie pour signer un contrat exceptionnel avec une importante entreprise d’événementiel.
Pas de chance, c’est précisément en ce jour si important que sa mère, Judith, internée pour bipolarité en hôpital spécialisé, décide de s’échapper. Pierre, contraint de s’en occuper tout en cherchant à la ramener à l’hôpital, renoue avec elle des liens rompus depuis plusieurs années. L’exaspération de la conduite de sa mère fait progressivement place au retour de l’amour filial.
L’immense point fort du film est la prestation magistrale de William Lebghil, qui interprète Pierre. Déjà très remarqué pour ses rôles dans Première année et Un métier sérieux, deux films de Thomas Lilti, l’acteur trouve ici un rôle plus adulte, plus profond, tout en sobriété. Son visage est incroyablement expressif et transmet au spectateur les émotions que le personnage traverse. On a hâte de voir ce que la suite de sa jeune carrière nous réserve.
Au contraire (malheureusement), Agnès Jaoui, pourtant immense actrice, ne trouve pas ici son meilleur rôle. Bien trop caricaturale – et passablement agaçante – dans la première partie du film, son exubérance donne le tournis (voire énerve) et empêche le spectateur de s’attacher au personnage de Judith. C’est l’une des raisons pour lesquelles je suis resté finalement très extérieur au film, qui se voulait pourtant un tire-larmes appuyé.
Outre le titre franchement pas terrible, j’ai trouvé par ailleurs l’écriture assez poussive. La vie de ma mère rassemble beaucoup de défauts propres aux premiers films, notamment une histoire inutilement étirée. Et j’ai vite compris ce qui me donnait cette impression : Le projet du film était à la base celui d’un court métrage. Julien Carpentier raconte en effet : « J’ai écrit un script d’une vingtaine de pages et je voulais absolument que ce soit Agnès Jaoui qui joue la mère. […] J’arrive à lui donner le scénario avec une petite note d’intention. Quinze jours plus tard, je reçois un mot d’Agnès, me disant qu’elle a adoré le projet, l’écriture, mais qu’elle ne joue pas dans les courts métrages, faute de temps ». Le projet est alors retravaillé pour l’étoffer et le passer sur une durée de long métrage...
Si La vie de ma mère n’est pas un grand film, le long métrage procure tout de même quelques émotions et l’on passe globalement un bon moment, sans déplaisir.
Pour un film plus profond sur la bipolarité, on préfèrera sans nulle doute Les Intranquilles, la petite pépite de Joachim Lafosse qui avait été présentée en Compétition à Cannes en 2021, et avait valu deux nominations – une à chacun de ses acteurs Damien Bonnard et Leïla Bekhti – aux César l’année suivante.