C'est un problème de ressenti récurrent, particulièrement adapté à La voie royale : là où certains voient dans le scénario un vivifiant souffle de réalisme, d'autres pointent du doigt une tendance aux clichés. Difficile de trancher entre les deux, disons plutôt que le film est très documenté et s'est efforcé de retranscrire une certaine réalité de ces prépas scientifiques, antichambres des futures élites de la nation. Avec ce que tout cela comporte de passages obligés pour les jeunes candidats à cette voie royale : le travail harassant et les médicaments, l'enthousiasme et les désillusions, la compétition et la solidarité, le bizutage, le machisme ambiant, la froideur des profs, etc. C'est que l'on peut reprocher à La voie royale, c'est son aspect programmatique, son caractère assez prévisible, et aussi son envie maladroite de parler de l'époque, avec l'ascenseur social, la crise agricole, les gilets jaunes, et cela fait quand même beaucoup. Le film n'est jamais meilleur que quand il se situe au plus près de son héroïne, une jeune fille ambitieuse mais fragile qui n'est pas prête à surpasser son complexe de classe, face à une concurrence bourgeoise élevée dans la soie et les certitudes de sa propre supériorité arrogante. Cette course d'obstacles est convaincante quand elle prend les contours d'un portrait intime et son interprète surdouée, Suzanne Jouannet, est remarquable. Elle est épaulée par un casting de seconds rôles très solide où brille notamment l'excellente Maud Wyler.