Il est tout à fait possible sans même aller voir le nouveau film de Jonathan Glazer, de se faire une assez bonne idée de son concept. Le bouche à oreille ou la simple lecture de son synopsis (que l'on trouve un peu partout) suffisent amplement pour comprendre quel est son sujet et surtout les deux idées, pas forcément si novatrices en réalité, qu'il véhicule. Ces concepts ont été tellement diffusés et discutés ces derniers temps que je me permets de le rappeler à nouveau ici.
Donc il s'agit bien pour La Zone d’Intérêt d'illustrer l'idée du hors champ et celle de la banalité du mal chère à Hannah Arendt. Pour celà, le film se concentre une période de quelques semaines (ou peut-être quelques mois, ce n'est pas forcément clair) dans la vie de famille du commandant d' Auschwitz qui habite, avec femme et enfants, dans une grande et jolie maison juste à côté du camp. On ne verra jamais l'intérieur de ce camp ni les personnes qui y sont enfermées, le champ visuel du film s’arrêtant à son enceinte extérieure. On revanche on entend beaucoup de choses hors champ et c'est là toute l'idée du film, celle que l'on peut mener une vie de monsieur tout le monde avec des discussions et des loisirs d'une banalité affligeante, alors que la mort et l'horreur sont à l’œuvre à quelques dizaines de mètres de là. Horreur qu'on ne peut absolument pas ignorer puisque on est personnellement chargé de la mettre en œuvre.
Ces idées sont évidemment intéressantes sur un plan intellectuel et le film reste extrêmement précis et maîtrisé dans sa mise en scène et son esthétique. Le souci c'est qu'il se borne essentiellement à illustrer ses propres concepts, tels que nous les avons définis plus hauts. Il les montre via une scène, puis le fait à nouveau à travers d'une autre et ainsi de suite. Ce faisant, il n'évite malheureusement pas toujours un aspect répétitif et une tendance à tourner un peu en boucle . Si on fait abstraction de sa trés bonne qualité formelle (le contraire serait surprenant pour un film sélectionné à Cannes) La Zone d’Intérêt semble surtout servir de support à ses propres concepts intellectuels. On finit par se dire que malgré la longueur pas trop importante (1h40) du film, un moyen ou même un court métrage auraient peut être d'avantage convenus.
Quand au fond du message, le réalisateur a peut être voulu montrer de la "banalité"mais ce qu'on voit à 'écran tient étrangement plutôt la tristesse et de la froideur. Comme si les personnages avaient subi une sorte de formatage ou de lavage du cerveau dont ils auraient vaguement conscience, mais contre lequel ils ne pourraient rien. D'avantage que la colère ou la révolte, c'est surtout une incroyable tristesse , une sorte de fatalisme qui se dégage de ce film à son visionnage.
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